le premier ministre tunisien Elyas Fakhfakh

Le chef du gouvernement tunisien Elyes Fakhfakh, fragilisé par une affaire de conflits d’intérêt, a présenté sa démission mercredi. Une démission qui ouvre la voie à de nouvelles négociations épineuses pour former un gouvernement.

« Pour éviter au pays des conflits entre institutions, le chef du gouvernement Elyes Fakhfakh a présenté sa démission au président Kais Saied, afin de lui ouvrir un chemin nouveau pour sortir de cette crise », écrivent les services du Premier ministre dans un communiqué.

Elyes Fakhfakh, 47 ans, avait prêté serment le 27 février 2020. Il va continuer à gouverner en attendant qu’un successeur soit nommé. Il aura effectué l’un des plus courts mandats depuis la révolution de 2011 qui a balayé le régime de Zine el Abidine Ben Ali.

La Tunisie, l’un des seuls pays touchés par les soulèvements du Printemps arabe à continuer sur la voie de la démocratisation, a depuis connu une valse de gouvernements, qui n’ont pas réussi jusque-là à répondre aux attentes sociales de la population.

Ennahdha, qui compte six ministres au gouvernement, avait dans la journée déposé une motion de défiance contre le Premier ministre, mettant en avant les soupçons de corruption pesant sur lui.

Fakhfakh, ancien cadre d’une filiale de Total, est sous le coup d’une enquête parlementaire pour ne pas avoir cédé la gestion de ses parts dans des sociétés d’assainissement qui ont remporté d’importants marchés publics ces derniers mois.

Mais pour Ennahdha, il s’agissait aussi de reconfigurer une coalition gouvernementale dans laquelle cette formation se sentait “marginalisée”, selon le politologue Chokri Bahria, cité par l’AFP. En effet, Ennahdha, bien que principal parti du Parlement, n’a remporté que 54 sièges sur 217 lors des législatives d’octobre, son plus faible score depuis la révolution de 2011.

Conséquence: le parti avait échoué cet automne à réunir une majorité autour du chef de gouvernement de son choix, après des mois de négociations ardues. Cela a laissé le champ libre au président Kais Saied, un farouche indépendant, qui a nommé comme Premier ministre M. Fakhfakh, entouré d’une coalition revendiquant les valeurs de la révolution, et peu encline aux compromis partisans chers à Ennahdha.

Cette démission place à nouveau le président Kais Saied au centre du jeu politique: selon la présidence, qui s’appuie sur l’article 89 de la Constitution, il est désormais chargé de désigner un nouveau Premier ministre dans un délai de dix jours.