Le 24 janvier dernier, un accrochage entre des éléments du mouvement rebelle du MFDC et l’armée sénégalaise, en Casamance, près de la frontière gambienne, avait fait quatre morts dans l’armée sénégalaise et deux rebelles tués. Sept militaires ont été également retenus prisonniers par les rebelles. Leur chef , Salif Sadio, accuse les militaires de la force d’attente de la Cédéao, positionnés en Gambie, d’être à l’origine de cet affrontement.

Le chef rebelle d’une des factions du MFDC, Salif Sadio, s’est confié à RFI après l’accrochage du 24 janvier dernier, entre des militaires sénégalais et des rebelles, en Casamance, près de la frontière gambienne.

« Il s’est passé quelque chose vraiment de regrettable. Des troupes armées venues du territoire de la Gambie sont venues s’attaquer à nos bases, avec de l’armement lourd. Pendant cette attaque, nous avons fait deux morts, que nous avons rendus, pour au moins réduire la souffrance des familles, et sept prisonniers de guerre, armes à la main. Chacun s’est dit élément des troupes de la Cédéao, basé en Gambie. Avec quelle mission : celle de protéger le gouvernement en place, c’est ce qu’ils ont dit… Quoiqu’il en soit j’ai sept prisonniers avec moi ; le combat s’est déroulé en territoire de Casamance, ils ont traversé la frontière pour venir s’attaquer à moi ; j’ai rendu les morts à la Cédéao parce que quand la Cédéao a reconnu que oui, c’était leurs éléments, il fallait leur rendre leurs morts… », a déclaré le chef rebelle, trouvé à Bajagar, en Casamance, non loin de la frontière avec la Gambie.

Une version servie par le chef rebelle qui ne cadre pas avec la version officielle de l’armée sénégalaise, qui avait affirmé que l’accrochage s’est déroulé alors que les militaires sénégalais avaient intercepté deux camions, avec à leur bord des hommes armés qui transportaient illégalement du bois. Une activité illicite à laquelle s’adonne depuis plusieurs années les rebelles du MFDC, en plus du trafic de drogue et le braquage des populations pour entretenir leurs troupes.

A la question de savoir s’il est prêt à libérer les prisonniers, Salif Sadio rétorque : « Je ne sais pas à qui je vais les rendre si ce n’est pas à la Cédéao. Ce sont eux les propriétaires quand même ! Parce que si leurs envoyés s’y intéressent, qu’ils viennent parler avec moi. Si les conditions se remplissent, immédiatement, on les libère. En 2012, j’ai rendu des prisonniers sénégalais – de l’armée sénégalaise – sans conditions ! Si le Sénégal est réellement engagé à négocier, à s’asseoir pour parler dans la paix, pour parler pacifiquement avec le MFDC pour régler le problème de la Casamance, où est le problème, je leur rends les prisonniers » !

Les prisonniers, monnaie d’échange pour une trêve et des négociations ? 

Le ton est donc donné. Le chef rebelle espère bien faire de ces militaires détenus, une monnaie d’échange pour amener une fois de plus les autorités sénégalaises à la table des négociations. Une tactique que Salif Sadio a toujours mise en avant, à chaque fois que lui et ses hommes ont été mis dans une situation inconfortable.

Depuis janvier 2021, l’armée sénégalaise a entrepris des opérations d’envergure contre les positions rebelles, qui ont permis de faire tomber 4 bases du MFDC en Casamance, le long de la frontière gambienne.

D’ailleurs, Salif Sadio affirme que l’accrochage du 24 janvier peut nuire à la trêve, mais ne peut pas arrêter le processus des négociations avec les autorités sénégalaises en cours, dirigées par la communauté San’Egidio.

« Ici, c’est une attaque de la Cédéao, une attaque étrangère. Ça peut nuire, peut-être, mais ça ne peut pas arrêter les négociations. Il y a un cas de guerre entre le Sénégal et la Casamance et un autre cas qui est la guerre (avec) la Cédéao … Mais je ne sais pas pourquoi, parce que je n’ai pas encore eu d’explication de cette guerre… », indique-t-il, menaçant au passage les autorités gambiennes. Selon lui, en effet, la Cédéao utilise le territoire gambien pour attaquer ses bases en Casamance.

Pour rappel, les soldats sénégalais, tombés en Gambie, font partie d’une mission militaire dépêchée en 2017 dans ce pays pour contraindre l’ex-chef de l’Etat, Yahya Jammeh, à quitter le pouvoir après avoir perdu l’élection présidentielle de 2016 remportée par l’actuel président, Adama Barrow.

Dans un récent communiqué, les Armées sénégalaises ont affirmé être  « plus que jamais déterminées à exécuter leur mission régalienne de défense de l’intégrité du territoire national et de protection des personnes et des biens ».