Des manifestants soudanais devant le ministère de la Défense à Khartoum, au Soudan.

Depuis le jeudi 11 avril 2019, le président Omar Hassan El-Bachir, au pouvoir depuis juin 1989 vient d’être destitué par l’Armée qui met sur pied un Comité militaire de Transition, dirigé par le ministre de la Défense le général Awad Ahmed Ibn Al-Awf. Devant l’insistance des manifestants qui ont pris d’assaut le QG de l’Armée, réclamant une transition “civile”, l’Armée recule : Al-Awf cède sa place à un autre général Abdel Fattah Al-Burhane, apparemment moins souillé que son prédécesseur. Le redoutable Salah Al Gosh, patron du service des Renseignements généraux(NISS) rend également le tablier. L’Union africaine semble adopter la même posture que les manifestants et somme le CMT de rendre le pouvoir aux civils, dans un délai de 15 jours au maximum.

La situation au Soudan évolue à pas de tortue. L’Armée poursuit son jeu de cache-cache en échangeant un général contre un autre, pour calmer les ardeurs des manifestants, plus que jamais décidés à se débarrasser des dictatures militaires.

Depuis l’annonce de la chute du général Omar Hassan El-Bachir, le 11 avril et la nomination du général Awad Ahmed Ibn Al-Awf, à la tête du Comité militaire de Transition, les manifestations se poursuivent avec plus d’intensité et d’enthousiasme. Le peuple réclame l’abrogation du cessez-le-feu, le transfert du pouvoir aux civils et la réduction de la durée de la transition, fixée à deux ans.

Le Comité militaire de Transition (CMT) était premièrement composé de 13 membres, tous issus des forces de défense et de sécurité. Ensuite, la plupart de ses membres, pour ne pas dire tous, étaient impliqués dans la gestion de l’ancien régime d’El-Bachir et avaient contribué à la répression des manifestants.

C’est ainsi que sur insistance des manifestants, l’Armée a fini par céder un peu en annonçant le remplacement de l’ancien ministre de la Défense le général Al-Awf, par un autre général à la tête du CMT. Le nouvel homme fort du Comité militaire Abdel Fattah Al-Burhane serait un officier clean et un homme de consensus qui ne s’était pas trop impliqué dans la mal gouvernance du régime d’El-Bachir.

Cet homme qui a été plébiscité par les Émirats arabes unis et l’Arabie Saoudite s’est d’ailleurs engagé à “éliminer les racines du régime d’Omar El-Bachir” et a annoncé une série de mesures en guise de concessions aux manifestants, en se disant “pressé de passer la main au plus vite à un pouvoir civil“.

Cependant, l’Union africaine se montre plus exigeante à l’endroit des nouveaux maître de Khartoum. Selon un communiqué de l’Organisation africaine ” L’armée a 15 jours pour quitter le pouvoir sinon, le pays sera suspendu de l’Union africaine“. Cette décision prise lundi 15 avril 2019, conforte les manifestants dans leur refus de se laisser voler leur victoire.

Il n’est pas fréquent de voir l’UA aussi tranchante sur une question pareille : Dans son communiqué rendu public hier, le Conseil de Paix et de Sécurité de l’UA (CPS) “demande que l’armée soudanaise se retire et remette le pouvoir à une autorité politique civile (…) d’ici à 15 jours maximum“.

L’Armée a intérêt à se conformer à la légalité internationale, d’autant que les populations soudanaises semblent perdre tout espoir de voir les militaires redresser la situation socio-économique du pays, qui se dégrade de jour en jour depuis la cession du Sud Soudan, emportant avec lui les ¾ de la manne pétrolière.