Le Médiateur de la Cédéao pour la Guinée, Thomas Yayi Boni est arrivé à Conakry dimanche, vers 17 heures. L’ancien président béninois va, à nouveau, mener une médiation entre les autorités de la transition, la classe politique et la société civile guinéennes, dans un contexte difficile, marqué par les récentes manifestations contre la junte et la mort de plusieurs jeunes. Samedi soir, les médias locaux ont annoncé le décès en détention de l’ancien ministre Loucény Camara, alors que plusieurs autres dignitaires de l’ancien régime sont toujours maintenus en prison, à Conakry.
Thomas Yayi Boni a été accueilli à Conakry, dimanche, par le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, Dr Morissanda Kouyaté.
Le Médiateur dans la crise guinéenne arrive au pays dans un contexte tendu. Les 28 et 29 juillet, des manifestations contre la junte militaire, à l’appel du Front national de défense de la Constitution, avaient été sévèrement réprimées par les nouvelles autorités, qui avaient fait appel à l’armée.
Au moins cinq personnes avaient été tuées et des dizaines d’autres blessées à Conakry. Plusieurs arrestations avaient également eu lieu, dont le Coordinateur du FNDC, Foniké Mengué. À la suite de ces événements, le ministre de l’Administration du territoire et de la décentralisation, Mory Condé, a annoncé la dissolution du FNDC, le 6 août dernier.
Ce qui n’avait pas empêché cette plateforme qui regroupe des partis politiques, des syndicats et des organisations de la société civile, à appeler à de nouvelles manifestations le 17 août dernier. Deux autres jeunes de 15 et de 19 ans avaient été également tués par balles dans la capitale guinéenne lors de cette journée de contestation contre la junte militaire.
L’ONU interpelle Mamady Doumbouya
Dans une lettre adressée au président de la transition guinéenne, le colonel Mamady Doumbouya, le 15 août dernier, la Haut-Commissaire aux Droits de l’homme des Nations unies, Michelle Bachelet, avait dénoncé la répression de ces manifestations, soulignant que « de telles actions pourraient constituer des violations des Droits de l’homme ». Elle avait également encouragé le gouvernement à ouvrir des enquêtes afin que les auteurs soient traduits en justice.
Elle était aussi revenue sur les nombreuses arrestations de manifestants, ainsi que des membres de l’opposition et de la société civile, appelant à leur libération et au respect de leurs droits fondamentaux.
La responsable onusienne avait aussi demandé au gouvernement guinéen de revenir sur sa décision de dissoudre le FNDC, affirmant qu’« une telle mesure constitue une atteinte grave à la liberté d’association et de réunion pacifique ». Aussi, avait-elle appelé à privilégier le dialogue pour apaiser les tensions politiques.
L’ex-ministre Loucény Camara décède en prison
Samedi soir, l’ancien ministre et député, Loucény Camara est décédé à la prison centrale de Conakry où il était placé sous mandat de dépôt sur instruction du procureur spécial près la CRIEF pour des faits présumés de malversations financières.
Ancien syndicaliste, Loucény Camara a été successivement président de la Commission électorale nationale indépendante, ministre du Tourisme, de l’Hôtellerie et de l’Artisanat, ministre des Pêches et de l’Économie maritime et ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat, avant d’être député à l’Assemblée nationale.
Agé de 62 ans, Lounceny Camara, membre du RPG, était détenu en prison depuis un an. Il faisait partie des nombreux anciens ministres et hautes personnalités en poste sous Alpha Condé, arrêtés après le coup d’Etat du 5 septembre dernier.
Nombre de personnalités de l’ancien régime, mais aussi de l’ancienne opposition sont inquiétées. Différentes voix s’élèvent pour dénoncer une instrumentalisation de la justice en Guinée et un exercice autoritaire du pouvoir de la part de la junte militaire.
Ce sont toutes ces questions que Thomas Yayi Boni devra évoquer avec ses interlocuteurs, avec en toile de fond, la durée de la transition et l’instauration d’un dialogue entre les nouvelles autorités et la classe politique.