Le Mali a accusé l’Algérie d’avoir abattu un de ses drones dans « son propre espace aérien » (ce qu’Alger dément) et a décidé de rappeler son ambassadeur et de fermer son espace aérien à tous les avions en provenance et à destination de l’Algérie.
Les deux autres États membres de l’AES (Alliance des États du Sahel), le Burkina et le Niger, ont, eux aussi, rappelé leurs ambassadeurs en poste dans la capitale algérienne.
Alger a répliqué en rappelant ses ambassadeurs dans ces trois pays et ferme son espace aérien avec le Mali.
À l’évidence, le torchon brûle entre Bamako et Alger, mais cela date d’au moins un an, depuis que l’Imam Dicko vit en exil en Algérie.
Cet homme religieux est l’un des plus grands opposants de la junte malienne qui dirige le pays depuis avoir perpétré un coup d’État en deux temps, en 2020 et 2021.
Depuis, Assimi Goïta et sa bande de colonels autoproclamés généraux monopolisent le pouvoir et refusent de le rendre aux civils.
Comme leurs collègues du Burkina et du Niger, ils ont rejeté les accords signés avec la CEDEAO (qui les obligeaient à céder le pouvoir en organisant des élections libres et transparentes) et à s’affranchir de la tutelle communautaire en quittant purement et simplement la CEDEAO pour former l’AES.
Depuis, ils multiplient les actes politiques pour renforcer leur union.
La solidarité affichée dans cette crise bilatérale entre Alger et Bamako en est une nouvelle illustration. Est-elle pertinente ? Rien n’est moins sûr !
En effet, Alger a des atouts que les membres de cette alliance fragile n’ont pas, sur les plans économique, politique, militaire et diplomatique.
Le Niger risque de perdre gros si ses projets économiques avec Alger venaient à être arrêtés ou retardés.
Le Mali, qui a déjà beaucoup de mal à combattre les terroristes de diverses factions qui agissent sur sa frontière nord (avec l’Algérie), ne pourra plus compter sur une aide quelconque de ce pays qui sert souvent de refuge à certains groupes.
Même s’il est vrai qu’aucun de ces États (y compris l’Algérie) n’a les moyens de contrôler l’immensité désertique où ces frontières sont ensevelies, au propre comme au figuré.
L’intérêt bien compris de tous serait de coopérer et d’agir ensemble pour vaincre les terroristes qui empêchent tout développement et toute émancipation des communautés dans cette partie du continent africain, où règne la loi de la jungle et celle des trafiquants en tous genres (drogue, migrants, armes, etc.).
La crise entre le Mali et l’Algérie a, ainsi, une dimension internationale.
Elle rend encore plus problématique la lutte contre les terroristes-jihadistes qui ont fait de l’Afrique leur zone de repli, après les revers sanglants qu’ils ont subis en Irak et en Syrie, notamment.
Les coups de menton des régimes malien et algérien ne sont pas à la hauteur des défis et urgences de l’heure.
Les populations des deux pays seront les victimes.
Et le Mali et ses soutiens, tous pays enclavés (ce que n’est pas l’Algérie), vont en pâtir davantage.
Avec des difficultés supplémentaires dans le domaine de l’approvisionnement.
Brider l’ego et privilégier la négociation est le chemin du réalisme, celui de la paix dont les deux États ont besoin.
Le cas de l’Imam Dicko pourrait aussi être réglé diplomatiquement pour lui permettre de revenir dans son pays, en toute liberté.
Les putschistes maliens, burkinabè et nigériens doivent respecter la souveraineté populaire et organiser des élections pour rendre le pouvoir aux civils.
Leur légitimité est injustifiable et leur durée au pouvoir prolongée ne fait que retarder le choix démocratique impératif des peuples.