L’Union africaine réunie en sommet à Niamey va lancer dimanche la « phase opérationnelle » de la Zone de libre-échange continentale (ZLEC), projet phare en vue de l’émancipation économique de l’Afrique. Le projet bénéficie désormais du soutien, longtemps désiré, de la première économie du continent, le Nigeria.
La ZLEC pourrait inclure potentiellement 55 pays et 1,2 milliard de personnes, pour un PIB cumulé de plus de 2.500 milliards de dollars. L’on devrait notamment connaître à Niamey, le pays choisi pour accueillir le secrétariat de la ZLEC – le Ghana et eSwatini, entre autres, sont candidats -.
Mais pour les observateurs, les négociations sur certains points très importants ne sont pas encore achevées. Il s’agit notamment de questions relatives au calendrier de l’abaissement des droits de douanes, attendu pour la mi-2020, les règles permettant d’établir qu’un produit a été fabriqué en Afrique (exemple: un t-shirt fabriqué au Cambodge et qui se voit apposer une broderie en Namibie ne pourra vraisemblablement pas porter le label “made in Namibia” ?) ou encore les règles de concurrence entre pays et les mécanismes d’arbitrage.
La ZLEC doit favoriser le commerce au sein du continent, attirer des investisseurs et permettre aux pays africains de s’émanciper de l’exploitation des matières premières. L’UA estime que sa mise en œuvre permettra d’augmenter de près de 60% d’ici à 2022 le commerce intra-africain, alors que les détracteurs du projet évoquent le manque de complémentarité des économies africaines et craignent que des importations bon marché ne sonnent le glas de certains petits producteurs agricoles et industriels.
Actuellement, seulement 16% du commerce des pays africains s’effectue avec d’autres pays du continent, et ce principalement au sein des groupes économiques régionaux tels que la SADC (Communauté de développement d’Afrique australe), la Cedeao (Communauté économique d’Afrique de l’Ouest) ou l’EAC (Communauté d’Afrique de l’Est). Le commerce intra-européen s’élève à quelque 65%.
Dans un rapport publié en avril, le Fonds monétaire international (FMI) soutient qu’« améliorer la logistique commerciale, tels les services douaniers, et régler le problème des mauvaises infrastructures pourrait être jusqu’à quatre fois plus efficace que la réduction des tarifs douaniers pour favoriser le commerce ».
Si 52 pays ont signé l’accord de la ZLEC depuis sa création en juillet 2018, cette dernière ne pouvait entrer en vigueur qu’après ratification de 22 pays au minimum. Ce chiffre a été dépassé, avec actuellement 25 pays signataires dont de nombreux poids-lourds du continent comme l’Afrique du Sud, l’Égypte, le Kenya ou l’Éthiopie.
Mais le projet souffrait jusqu’il y a peu de l’absence notable de la première économie africaine, le Nigeria et son marché de quelque 190 millions d’habitants. Le Nigeria, dont l’économie repose essentiellement sur les exportations de pétrole, avait encouragé les premières discussions sur la ZLEC au tournant du millénaire. Mais le protectionnisme a pris le pas sur l’ouverture notamment en raison d’une grave récession en 2016 et 2017.