Homme politique discret voire effacé, le vice-président Kablan Duncan sort du bois pour se draper du manteau de « réconciliateur » entre Ouattara et Bédié.
Pourtant ce discours bruyant sonne creux car son auteur a choisi, aussi de fonder : PDCI/RENAISSANCE. Dès lors son positionnement politique devient très clair : il est en rupture de ban avec le PDCI (canal historique) du président Henri Konan Bédié.
Ce dernier n’avait pas hésité à faire exclure tous les « rebelles » qui avaient défié son autorité en rejoignant le RHDP (rassemblement des houphouètistes pour la démocratie et la paix) porté sur les fonts baptismaux par Ouattara contre l’avis de Bédié.
Duncan entre donc en rébellion et devrait subir le même sort que ses devanciers. En rassemblant près de 10 000 militants PDCI, il démontre sa capacité de mobilisation et sa détermination à prendre en mains son propre destin politique.
En soi, c’est une rebuffade spectaculaire de la part d’un homme issu du sérail et qui a brillé, jusqu’ici, par son effacement. Il a ainsi fait une longue et remarquable carrière politique sous l’ombre des grands, notamment Bédié. Ministre, Premier ministre et maintenant vice-président, Duncan, toujours second, a- t-il l’étoffe d’un leader ? Rien n’est moins sûr !
Les objectifs avancés pour justifier son sursaut, à savoir, prévenir une nouvelle éruption de violence comme en 2010, sont louables. Mais a-t-il les moyens de les atteindre en s’alliant avec Ouattara ? Parce que sa démarche n’a pas d’autre finalité visible immédiatement.
Tout laisse croire qu’on assiste à une recomposition politique explosive qui se traduirait par l’émergence de deux blocs : PDCI de Bédié, FPI de Gbagbo et Forces nouvelles de Soro contre RDR /RHDP de Ouattara et alliés. La représentativité de chacun de ces deux blocs est difficile à estimer à l’heure actuelle.
Le camp Ouattara a certes gagné le plus grand nombre de communes lors des élections locales. Mais le PDCI a fait très bonne figure. S’il s’allie vraiment au FPI et à Soro, son poids électoral sera impressionnant, et un risque d’affrontement avec le RHDP sera réel.
Du reste des violences dramatiques ont ensanglanté les locales. Une présidentielle, avec des enjeux autrement plus importants, pourrait faire basculer le pays dans la guerre civile.
L’inquiétude des alliés de Duncan est justifiée mais le modus operandi choisi pour éviter la crise ne semble pas être le meilleur. Il va susciter l’hostilité des partisans de Bédié qui n’accepte aucune « égratignure » à son autorité.
Sa rupture avec Ouattara a des causes profondes, notamment le refus de ce dernier de soutenir un candidat PDCI pour 2020, mais aussi des causes liées à des questions de forme qui sont essentielles.
Ouattara a formé le dernier gouvernement sans informer Bédié. Ce fut un manque de respect, cassus belli. Duncan vient de défier le vieux lion ou plutôt le vieil éléphant de Daoukro. A ses risques et périls.