Le président soudanais Omar El-Béchir a procédé samedi à des changements dans les hautes sphères du pouvoir. Ces changements interviennent au lendemain de l’annonce de l’état d’urgence et du limogeage des gouvernements fédéral et provinciaux.
Ces mesures ont été prises par le président soudanais après deux mois de contestation antigouvernementale. El-Béchir a en effet limogé samedi son premier vice-président et allié de longue date Bakri Hassan Saleh, le remplaçant par le ministre de la Défense Awad Ibnouf qui conserve son portefeuille. Il a en outre nommé au poste de Premier ministre Mohamed Taher Ela, ancien gouverneur de l’État agricole d’Al-Jazira, selon la présidence.
Les organisateurs de la contestation ont réagi à ces mesures choc en assurant qu’elles n’empêcheraient pas les manifestants de poursuivre leur mouvement pour réclamer le départ du chef de l’État.
Vendredi, le président El-Béchir a annoncé, dans un discours à la nation, « la dissolution du gouvernement aux niveaux fédéral et provincial » et décrété l’état d’urgence pour un an, affirmant que le Soudan traversait la situation « la plus difficile de son histoire ». Il a en outre nommé à la tête des 18 provinces du pays 16 officiers de l’armée et deux responsables de la sécurité.
Omar El-Béchir a limogé aussi vendredi les gouvernements central et locaux, affirmant que le pays avait besoin de « gens qualifiés ». Cinq ministres, dont ceux des Affaires étrangères, de la Défense et de la Justice, conserveront leur portefeuille, a-t-il dit.
Le Soudan est depuis le 19 décembre le théâtre de manifestations quasi quotidiennes déclenchées par la décision du gouvernement de tripler le prix du pain en plein marasme économique.
La contestation s’est vite transformée en un mouvement réclamant le départ du chef de l’État, âgé de 75 ans, qui tient le pays d’une main de fer depuis 1989 et envisage de briguer un troisième mandat lors de la présidentielle de 2020.
« El-Béchir va concentrer les pouvoirs et cela va ouvrir la voie à une confrontation avec le mouvement de protestation qui pourrait devenir plus violente », déclare Murithi Mutiga, de l’International Crisis Group, cité par l’AFP.
Les manifestations, qui ont touché la capitale Khartoum et de nombreuses villes du pays, ont été réprimées par le puissant Service national du renseignement et de la sécurité (NISS).
Selon un bilan officiel, 31 personnes sont mortes depuis le 19 décembre. L’ONG Human Rights Watch (HRW) évoque le chiffre de 51 morts, dont des enfants et des personnels médicaux.