Le chef de l’Etat égyptien Abdel Fatah Al-Sissi est en visite d’Etat en France pour deux jours. Il est accueilli en grandes pompes par son homologue français, Emmanuel Macron. Ce dernier sait être réaliste quand les intérêts bien compris de son pays l’exigent, notamment en matière de vente d’armes. C’est pour quoi, il a affirmé, à la face du monde, qu’il ne va pas « conditionner la coopération avec l’Egypte à la question des droits humains ».
Cela a le mérite de la clarté et le réalisme du président français est parfaitement compréhensible. Ce qui ne l’était pas, c’est sa sortie hasardeuse sur les « caricatures » qui a suscité un tollé dans le « monde musulman », à juste titre. Et, ce « pas de deux », semble trahir chez Macron, une sorte d’attitude instable qui caractérise une démarche politique très influencée par la volonté de plaire aux médias. Heureusement que le retour de boomerang produit des effets percutants qui ont la vertu de pousser Macron, à défaut de faire son mea culpa, de marcher à reculons.
La visite de Al Sissi à Paris est une occasion inespérée et/ou souhaitée pour rectifier le tir et lancer un message d’apaisement au monde musulman. Mais, toujours gêné aux entournures par les commentaires de la presse sur « la question des droits de l’homme », il assume en refusant de conditionner la coopération bilatérale à la condition des droits humains, tout en faisant savoir, cependant qu’il y a désaccord sur ce sujet.
Al-Sissi, lui a d’ailleurs fait remarquer que l’expression libre de son point de vue sur les « caricatures » avait heurté des millions de musulmans et que cela méritait d’être examiné. Ces échanges diplomatiques mettent en exergue le fait que la coopération entre les Etats ne peut pas être otage des considérations, certes légitimes, sur le respect des droits humains.
Est-il défendable, moralement, de vendre des armes ? Dans l’absolu, la réponse est non, mais dans le monde réel, les contingences l’imposent, en justifiant leur fabrication et leur commercialisation, notamment dans un système économique capitaliste mondial. Vendre donc, mais à qui ? A ceux qui peuvent payer et/ou qui sont des alliés.
La France est l’un des plus gros vendeurs d’armes du monde, il faut le savoir. Cette industrie génère d’énormes profits et créent des emplois aussi. Un tel pays ne peut faire fi de cette réalité pour faire plaisir à des médias et à des ONG que personne n’a élu. Est-ce faire l’éloge d’un cynisme total ? Non, mais plaider pour un réalisme nécessaire. Macron doit savoir bien peser ses mots et se faire violence pour parler moins face aux journalistes.
Le partenariat avec l’Egypte est l’ombre portée de celui avec des pays du Golfe et de l’Arabie Saoudite, Il s’enracine en opposition avec la Turquie qui attaque violemment Macron, à chaque fois que l’occasion se présente. La lune de miel avec l’Egypte de Al-Sissi est compréhensible, la rebuffade par rapport aux pressions des droits de l’hommiste aussi.
Maintenant le président français doit tenir sur cette ligne de crête comme un funambule des discours. Macron va-t-il tenir la distance ? Rien n’est moins sûr ! L’homme aime tellement parler et s’enfonce, souvent dans ses propres dérapages verbaux.