Le chef du parti islamo-conservateur Ennahdha, Rached Ghannouchi, principal opposant au président Kaïs Saïed en Tunisie, a été placé sous mandat de dépôt. C’est ce qu’a annoncé jeudi 20 avril sa formation, en dénonçant un « emprisonnement injuste ».

Il avait été interpellé lundi soir sur la base de déclarations dans lesquelles il avait affirmé que la Tunisie serait menacée d’une « guerre civile » si les partis de gauche ou ceux issus de l’islam politique comme Ennahdha, y étaient éliminés.

Selon l’avocat Mokhtar Jemai qui intervenait sur une radio privée, un juge d’instruction a décidé d’émettre un mandat de dépôt pour incarcérer le chef islamiste de 81 ans à l’issue d’un interrogatoire de plus de 9 heures.

Le Front de salut national (FSN), coalition d’opposition dont est membre Ennahdha, a confirmé que le juge a invoqué notamment le motif de « complot contre la sécurité de l’Etat » pour écrouer Rached Ghannouchi.

Le FSN a dénoncé « un effondrement des libertés dans le pays », soulignant que Rached Ghannouchi n’avait fait qu’émettre « une opinion dans un séminaire organisé par le FSN ». Pour le FSN, le pouvoir « a fini par criminaliser la liberté d’expression et d’activité politique pacifique, preuve de son échec à préparer un dossier judiciaire sérieux ».

Dans un communiqué, Ennahdha a rejeté toute intention de Rached Ghannouchi d’appeler à la guerre civile, disant « condamner fermement une décision injuste qui a pour but de couvrir l’échec total du pouvoir à améliorer les conditions économiques des citoyens ».

Rached Ghannouchi est l’opposant le plus en vue à être arrêté depuis le coup de force du président Kais Saied qui s’est emparé des pleins pouvoirs en juillet 2021. Selon les médias, cinq hauts responsables de Ennahdha interpellés au même moment que lui ont été remis en liberté.

Les États-Unis ont dénoncé mercredi soir « une escalade inquiétante » en Tunisie, après l’emprisonnement d’une vingtaine d’opposants ainsi que de personnalités dont des hommes d’affaires et le directeur de la radio la plus écoutée du pays, Radio Mosaïque, depuis début février.

L’Union européenne avait exprimé sa grande « inquiétude » dès mardi après le placement en garde à vue de M. Ghannouchi, rappelant l’importance du « principe fondamental du pluralisme politique ».