Xavier Driencourt, ambassadeur de France en Algérie de 2008 à 2012 et de 2017 à 2020, estime que le royaume du Maroc « a pris une longueur d’avance » sur l’Algérie, « notamment par la signature des Accords d’Abraham ».
Interviewé par Gabriel Robin pour le magazine français Causeur sur la palette de défis auxquels fait face, actuellement, la France dans ses relations avec l’Afrique et, en particulier, avec le Maroc et l’Algérie, le diplomate français a, par ailleurs, souligné qu’au même titre que les rapports entre Rabat et Alger, « les relations franco-marocaines sont également très dégradées ».
« Elles ne procèdent pas de la même physionomie que les relations franco-algériennes. Ce que l’on constate c’est que Paris a quasiment tout misé sur Alger et finalement, ce pari algérien que nous avons fait aux forceps nous fait perdre sur les deux tableaux : aucun retour positif côté algérien, une froideur distante du côté de Rabat qui cherche à reprendre la main face à Paris », a-t-il fait remarquer, notant que les Français sont « seuls et nus dans ce jeu triangulaire ».
L’auteur de « L’énigme algérienne : Chroniques d’une ambassade à Alger », considère un peu plus loin, que « les contentieux sont nombreux » entre Rabat et Paris. Interrogé sur les conséquences de la récente reconnaissance par Israël de la souveraineté du Maroc sur le Sahara, Driencourt estime qu’il y a eu « un tournant dans cette région avec la signature des Accords d’Abraham ».
« Avec toutes les conséquences que l’on voit (et qu’Alger voit également) : l’arrivée d’Israël dans la région, fait impensable il y a quelques années, un possible rôle joué par Tsahal, une montée en puissance progressive, des échanges politiques, militaires, entre les deux capitales. Bref, les choses peuvent s’emballer et c’est un changement radical qui comporte des risques », a-t-il fait savoir.
Il relève à ce propos qu’il y a « d’un côté Rabat, Washington et Tel-Aviv et de l’autre Alger soutenu par Moscou ». « On constitue une sorte de mur entre les deux pays qui déjà s’entendaient mal. Ces rapports de forces peuvent aboutir à un certain équilibre, mais aussi à un possible dérapage », nuance cet ancien directeur général de l’administration du Quai d’Orsay.