Le Mali a reçu mercredi une mission conduite par l’ancien président du Nigeria Goodluck Jonathan. Cette mission est censée rapprocher un pouvoir et un mouvement de contestation apparemment irréconciliables à l’approche d’un nouveau rassemblement à hauts risques.
La mission de conciliation est composée de personnalités politiques et d’experts de pays de la Communauté des Etats ouest-africains (CEDEAO). Elle a posé le pied à Bamako 24 heures après que les leaders de la contestation, tout juste relâchés, ont dit ne plus avoir d’autre objectif que la démission du président Ibrahim Boubacar Keïta.
Les leaders de la contestation ont appelé à un rassemblement vendredi, une semaine après une manifestation qui a mal tourné, point de départ des troubles civils les plus graves qu’ait connus depuis des années la capitale.
La mission doit rencontrer les différents acteurs de la crise. Elle comprend des experts constitutionnalistes. Parmi les voies de sortie de crise empruntées par un pouvoir secoué, figure la nomination de nouveaux juges à la Cour constitutionnelle.
De vendredi à dimanche, Bamako a connu trois jours d’affrontements qui ont fait 11 morts et 158 blessés selon le Premier ministre Boubou Cissé. Le mouvement du 5-Juin, le collectif qui porte la contestation, fait état d’un bilan plus lourd.
Le Mouvement du 5-Juin canalise des mécontentements multiples et profonds, contre la dégradation sécuritaire et l’incapacité à y faire face, le marasme économique et social, la défaillance de l’Etat, ou le discrédit répandu d’institutions suspectes de corruption.
Ces griefs sont anciens. Mais les législatives contestées de mars-avril passent pour avoir provoqué un déclic et agrégé une coalition hétéroclite de personnalités religieuses, du monde politique et de la société civile, autour de l’imam Mahmoud Dicko, éminente figure publique et farouche adversaire du pouvoir.
Une mission de bons offices de la CEDEAO en juin avait conclu que cette décision était « à la base de la crispation ». Elle avait appelé le gouvernement à “reconsidérer” les résultats dans les circonscriptions concernées et à y organiser des élections partielles “dans les meilleurs délais”. Elle avait aussi jugé nécessaire l’installation d’un “gouvernement consensuel d’union nationale”.
Ces préconisations sont soutenues par une grande partie de la communauté internationale. Parmi les gestes d’apaisement qu’il a tentés, le président s’est dit ouvert à un retour en arrière sur la trentaine de résultats controversés.
Il a annoncé la dissolution de la Cour constitutionnelle pour créer les conditions de cette marche arrière. Cette dissolution cause des complications non seulement politiques, mais légales, que les constitutionnalistes ouest-africains sont supposés l’aider à résoudre. Cependant aucune des ouvertures du président jusqu’alors n’a fissuré profondément l’intransigeance du M5.