L’Afrique accueille cette semaine une nouvelle tournée diplomatique d’Emmanuel Macron, qui a choisi l’île Maurice pour ouvrir un déplacement de cinq jours sur le continent. Pour les pays africains concernés, cette séquence soulève autant d’attentes que de questions sur la manière dont la France souhaite repositionner sa présence dans un espace où les équilibres stratégiques évoluent rapidement.

Le chef de l’État français est arrivé jeudi à Port-Louis, sur cette île de l’océan Indien devenue une référence régionale en matière de diversification économique. Derrière la visite protocolaire, les partenaires africains observent surtout ce que Paris entend proposer dans une période où son influence s’est érodée dans plusieurs régions du continent.

Maurice, point d’ancrage dans l’océan Indien

Avec un peu plus d’un million d’habitants et un PIB par tête supérieur à 10.000 dollars, l’île Maurice s’est transformée en quelques décennies, passant d’une économie centrée sur le sucre à un pôle fondé sur le tourisme, les services et la finance.
Ancienne colonie française puis britannique, indépendante depuis 1968, elle conserve une forte présence francophone tout en développant un positionnement régional autonome.

La visite d’un président français n’y avait plus eu lieu depuis 1993. Pour Maurice, cette rencontre avec Emmanuel Macron et les discussions prévues avec le Premier ministre Navin Ramgoolam s’inscrivent dans une logique de coopération régionale, notamment sur la sécurité maritime, alors que les trafics – drogue, pêche illicite, migration irrégulière – s’intensifient dans l’océan Indien.

La France doit également appuyer des projets structurants via l’AFD, en particulier la sécurisation du réseau électrique face aux aléas climatiques et la modernisation de la gestion de l’eau.

Afrique du Sud, Gabon, Angola : les autres étapes africaines

Après Port-Louis, le président français rejoindra l’Afrique du Sud, hôte du sommet du G20, avant de se rendre au Gabon, où il rencontrera Brice Clotaire Oligui Nguema, au pouvoir depuis 2023.
La tournée s’achèvera en Angola, lors d’une rencontre Union africaine–Union européenne, moment important pour évoquer des partenariats économiques diversifiés.

Les autorités françaises disent vouloir promouvoir des « solutions économiques » dans un esprit de coopération équilibrée. De nombreux pays africains verront là une occasion d’évaluer la cohérence entre ces intentions et l’évolution récente des positions françaises, dans un contexte de concurrence accrue dans plusieurs secteurs, notamment les mines, les infrastructures et la sécurité.

Une relation franco-africaine en redéfinition

Pour nombre d’Africains, cette tournée s’inscrit dans une trajectoire plus large : celle des repositionnements diplomatiques en Afrique. Depuis 2017, Paris affirme vouloir rompre avec les logiques héritées de l’époque coloniale et diversifier ses partenariats, y compris vers les pays anglophones.
Ces orientations ont parfois été mal perçues dans des États francophones qui y ont vu un manque d’égards, d’autant que la montée de sentiments antifrançais au Sahel a coïncidé avec le retrait progressif des forces françaises.

Aujourd’hui, alors que les échanges commerciaux entre la France et le continent reculent proportionnellement, la tournée d’Emmanuel Macron apparaît comme un moment d’observation pour les capitales africaines : il s’agit de mesurer comment un acteur historique entend se repositionner face à la montée d’autres partenaires – asiatiques, moyen-orientaux et africains eux-mêmes – dans un continent en pleine mutation.