Le Tchad a mis fin à ses accords militaires avec la France, tout en affirmant qu’il n’y avait pas de “logique de remplacement” par une autre puissance.
“Pour lever toute ambiguïté, cette décision de rupture ne constitue en aucun cas un rejet de la coopération internationale, ni une remise en question de nos relations diplomatiques avec la France”, a dit le général Mahamat Idriss Déby, quelques jours après l’annonce surprise de la rupture de ces accords avec son allié traditionnel, qui remontaient à l’indépendance du pays.
“Le Tchad n’est nullement dans une logique de remplacement d’une puissance par une autre, encore moins dans une approche de changement de maître”, a assuré le chef d’Etat dans une déclaration à la presse, invoquant la “souveraineté” de son pays et soulignant que “cette décision n’a pas été prise de manière légère”.
Jeudi, l’annonce de la suspension des accords militaires faite par un communiqué du ministre des Affaires étrangères tchadien posté sur Facebook quelques heures après une visite de son homologue français à la frontière soudanaise, a surpris Paris qui a déclaré seulement le lendemain soir “prendre acte”.
La France a déjà été contrainte d’évacuer ses troupes du Mali, du Burkina Faso et du Niger entre 2022 et 2023 après l’arrivée au pouvoir de juntes militaires qui se sont rapprochées de Moscou. Le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye a également indiqué jeudi dans un entretien à l’AFP que la France allait devoir fermer ses bases militaires au Sénégal.
“Nous avons décidé de mettre un terme a cette coopération militaire pour réorienter notre partenariat avec la France sur d’autres domaines qui auront plus d’impacts positifs sur le quotidien de nos populations respectives”, a expliqué dimanche le président tchadien.
“Le Tchad continuera de jouer tout son rôle et d’occuper toute sa place au sein des initiatives de renforcement de la paix et de la sécurité sur le continent africain”, s’est-il engagé.
Les accords de coopération militaire avec la France étaient devenus “complètement obsolètes” et ne correspondent plus “aux réalités politiques et géostratégiques de notre temps”, a ajouté le chef d’Etat, évoquant notamment “des attaques de dimension terroriste” auxquelles le pays fait face.
Le général Déby s’exprimait dimanche soir pour la première fois depuis l’annonce, choisissant de prendre la parole lors de la cérémonie officielle marquant l’avènement de la démocratie au Tchad il y a 34 ans. L’annonce jeudi avait elle aussi été faite le jour anniversaire symbolique de la proclamation de la République tchadienne en 1958.
Dernier point d’ancrage de la France au Sahel, le Tchad accueille un millier de militaires français répartis sur trois bases. “Le gouvernement est instruit à prendre attache avec la partie française pour la mise en œuvre de cette décision”, a précisé le général Déby dimanche.
L’accord prévoit que “chaque partie peut dénoncer le présent traité par le biais d’une notification écrite”, cette dénonciation “prenant effet six mois après réception” par l’autre partie, selon le texte. Selon le Quai d’Orsay, Paris avait déjà entamé “une réflexion et un dialogue avec ses partenaires sur la reconfiguration de ses dispositifs militaires en Afrique”.
En mai dernier se sont achevées à N’Djamena trois années de transition avec l’élection de Mahamat Idriss Déby, porté au pouvoir par une junte militaire après la mort de son père Idriss Déby tué par des rebelles au front. Menacé par des offensives rebelles, Déby père avait pu compter sur l’appui de l’armée française pour repousser celles-ci en 2008 puis en 2019.