Un président américain qui met en cause la propriété intellectuelle ? Incroyable mais, vrai !
Et, naturellement cela a provoqué un tollé outre-Atlantique, où les patrons des deux grands « gagnants des vaccins anti-Covid », à savoir les sociétés Pfizer et Moderna se sont lamentés et vont continuer de s’arracher les cheveux avec les effets immédiats en Bourse, qui ont précipité la chute des actions de ces compagnies.
Le choix de Biden semble curieux ou « gauchiste » ; mais les choses ne sont pas si simples.
En effet, si l’annulation ou la suspension des droits des brevets sont décidées, il y a risque de décourager les laboratoires qui ont fourni tant d’efforts et dépensé beaucoup d’argent pour trouver « la solution miracle » des vaccins ARN.
Même si, elles ont bénéficié grandement de financements publics multiformes.
Logiquement les responsables de l’industrie pharmaceutique ont rué dans les brancards pour défendre leurs droits et prévenir contre les effets à long terme d’une telle décision sur les « motivations » de la recherche scientifique dans ce domaine.
Pourtant Biden n’est pas subitement devenu un gauchiste ou un socialiste ; il se soucie, d’abord et avant tout de la récession mondiale causée par la pandémie de la Covid.
L’option serait de sacrifier les brevets pour précipiter la relance économique planétaire, laquelle bénéficiera à tout le monde, y compris à l’industrie pharmaceutique.
La situation de l’Inde a peut-être été le déclic, car ce pays aussi peuplé que la Chine,(environ 1 milliard 400 millions d’habitants), est en train de sombrer, avec l’explosion des contaminations et des décès. Tous les records terrifiants sont battus et tous les pays riches sont mobilisés pour envoyer de l’aide sur place.
Cette solidarité est aussi économiquement orientée, si on peut dire, car l’Inde constitue un maillon important dans la mondialisation.
Si les brevets sont « libérés », elle a les moyens technologiques et scientifiques pour produire les vaccins, en très grande quantité.
D’ailleurs elle le fait déjà pour les compagnies comme Astrazeneca, notamment.
Le « saut » de Biden est donc lucide ; c’est celui d’un homme de vision, d’un chef d’Etat qui privilégie l’intérêt national américain à long terme.
Il sacrifie un dogme capitaliste-qui est de bon sens : la propriété intellectuelle est à protéger pour garantir une sortie à grande vitesse de cette pandémie qui met l’économie mondiale à genoux.
Certes les USA sont en train de s’en sortir avec bientôt un taux de vaccination de près de 100% ; mais si des pays comme l’Inde et d’autres moins peuplés comme le Brésil, l’Afrique du Sud etc. restent dans l’œil du cyclone, le monde restera en récession.
Comment expliquer cela à l’opinion publique américaine, majoritairement attachée au libéralisme économique pur et dur.
Même si la pandémie a fait bouger les lignes et nombre d’Américains, en fait une majorité, soutiennent l’intervention de l’Etat dans l’économie.
Dans les faits, cela a toujours été le cas lors des grandes crises comme celle historique de 1929.
Ce qui se passe, avec la Covid est, peut-être d’une ampleur encore plus grande ; la mondialisation s’étant élargie à beaucoup d’autres pays.
Toutefois, Biden est loin d’avoir partie gagnée car, au niveau de l’OMC, des géants économiques comme le Japon, les pays membres de l’Union européenne, la Suisse et le Brésil refusent de s’aligner.
Vont- ils finir par accepter ? Ce n’est pas évident et la bataille, de toutes les façons, ne fait que commencer.
Que les moralistes s’abstiennent de faire des sermons. Il est ici question, de profits, d’intérêts et de bataille économique.
Même si, c’est sur fond de pandémie et de course contre la mort.