De nombreux Soudanais ont de nouveau manifesté jeudi, dénonçant l’état d’urgence imposé par le président Omar El-Béchir. Ce dernier est confronté depuis plus de deux mois à un vaste mouvement de contestation réclamant sa démission.
Malgré l’état d’urgence, les manifestants, menées par des femmes et scandant des slogans anti-Béchir, ont de nouveau défilé à Khartoum et dans la ville voisine d’Omdourman. Les organisateurs, l’Alliance pour la liberté et le changement (ALC), avaient appelé à manifester en soutien aux femmes, à la veille de la Journée internationale de la Femme le 8 mars. « Nous appelons notre peuple à manifester pour faire honneur à ces mères qui ont perdu leurs enfants dans notre lutte », avaient souligné les organisateurs.
Jeudi soir, les forces de l’ordre ont tiré des gaz lacrymogènes pour disperser des manifestants qui s’étaient réunis dans le nord de Khartoum, selon des témoins cités par les médias. L’état d’urgence a été imposé le 22 février, pour un an et dans tout le Soudan, par le président soudanais qui tient le pays d’une main de fer depuis son arrivée au pouvoir par un coup d’État en 1989.
Le président soudanais a interdit les manifestations non autorisées et ordonné la mise en place de tribunaux d’urgence pour juger toute personne ayant violé l’état d’urgence. Le mouvement de contestation a débuté le 19 décembre après la décision du gouvernement de tripler le prix du pain, en plein marasme économique. Il s’agit du plus sérieux défi au pouvoir du président El-Béchir.
Par ailleurs, huit manifestants condamnés le 28 février à de lourdes peines de prison allant de cinq ans à six mois pour participation à un rassemblement interdit, ont vu leurs condamnations annulées par une « cour d’appel d’exception ».
Plus de 900 manifestants avaient été déférés devant les tribunaux d’urgence la semaine dernière après des rassemblements similaires. Plusieurs d’entre eux ont été condamnés à des peines de deux semaines à cinq ans de prison.
Depuis la mise en place de l’état d’urgence, les rassemblements sont devenus plus rares et semblent désormais avoir lieu surtout les jeudis. Peu de manifestations ont été rapportées hors de la capitale ces dernières semaines, écrit l’AFP. Selon un bilan officiel, 31 personnes sont mortes depuis le 19 décembre. L’ONG Human Rights Watch (HRW) évoque le chiffre de 51 morts, dont des enfants et des personnels médicaux.