L’ex-président Me Abdoulaye Wade.

La présidentielle de 2019 au Sénégal entre dans sa dernière ligne droite. C’est dimanche 3 février 2019 que la campagne électorale va démarrer et se poursuivra pendant 3 semaines. D’ores et déjà, les 5 candidats retenus après le filtre du parrainage, se démènent à la recherche d’alliés de la dernière heure. Ainsi, le Parti démocratique sénégalais (PDS) dont le candidat Karim Wade est recalé, est à l’écoute du Pape du Sopi, Me Abdoulaye Wade. De source sûre, celui-ci opte pour un boycott stratégique.

La scène politique sénégalaise est en effervescence. Dans 24 jours, les électeurs vont se rendre aux urnes pour choisir celui qui va présider aux destinées du pays pour les 5 ans à venir. Déjà, les coalitions se forment autour des cinq partants qui sont : Macky Sall (Président sortant), le Pr Issa Sall (du parti PUR), Me Madické Niang (dissident du Pds dont il se réclame toujours) et Idrissa Seck (Parti Reewmi).

Pour les pronostics et autres sondages, le candidat Mack Sall, part nettement favori, compte tenu de la grande coalition qui porte sa candidature et d’un bilan, jugé positif, en dépit de quelques insuffisances notamment au niveau de sa politique de jeunesse et de l’emploi.

Après les deux mandats d’Abdoulaye Wade (2000-2012), les Sénégalais pensaient que personne ne pourrait plus égaler ses performances en matière de l’édification des infrastructures. En 7 ans, son ancien premier ministre et maître d’œuvre de la quasi-totalité des réalisations de Me Wade, est en train de lui damer le pion. L’ingénieur géologue, Macky Sall a transformé le Sénégal en chantier durant son premier mandat qui s’achève en mars 2019. Il est vrai qu’au niveau des primo-votants, la tendance va vers le candidat le plus jeune Ousmane Sonko, qui développe un discours à la fois islamiste et populiste.

En deuxième position, il y a le candidat du Parti de l’Unité pour le Rassemblement (PUR), le professeur Issa Sall. Un intellectuel de haut niveau, pondéré, mais ferme dans ses principes. Il s’adosse à un mouvement religieux, bien organisé, à savoir le Mouvement des Moustarchidines wal Moustarchidates (issu de la confrérie tidjanya) dont le guide Moral Serigne Moustapha Sy est le président-fondateur du PUR. Titulaire d’un doctorat en informatique, le Pr Sall est aussi président de l’Université privée du Sahel. Il se considère comme faisant partie de l’opposition.

En troisième lieu, il y a Idrissa Seck, ancien Premier ministre du Président Abdoulaye Wade, président du Parti Reewmi et candidat de la Coalition Idy-2019. Bon tribun et tacticien futé, Idy a quand même grillé plusieurs de ses cartes, pour avoir souvent mis en avant, la ruse avant l’éthique. Il est le seul, parmi les 5 candidats, à n’avoir pas eu de diplômes universitaires et à avoir validé sa candidature au 2ème tour du parrainage. Déjà candidat à la présidentielle de 2007 (classé 2ème) et à celle de 2012 (classé 5ème), Idrissa Seck semble avoir usé et abusé du dépôt de confiance qui le liait aux populations sénégalaises. Il reste pourtant l’unique candidat, avec le président Macky Sall, à avoir été Premier ministre et candidat à une élection présidentielle précédente.

Le candidat Ousmane Sonko, le benjamin des candidats (il est né le 15 juillet 1974) a fréquenté l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, d’où il sort titulaire d’une maîtrise en droit public. Il est ensuite breveté de l’École nationale d’Administration (ENA) et a travaillé dans l’administration sénégalaise comme inspecteur des impôts, avant d’être élu député à l’Assemblée nationale en 2017. Taxé d’Ibâdou (islamiste), Ousmane Sonko a opté pour un discours populiste et superficiel qui a porté ses fruits. Il réussit, en un laps de temps, à se positionner comme un acteur politique majeur. Il prône la rupture avec l’ancien système et de sortir le Sénégal de la Zone du franc CFA, si jamais il est élu président en février 2019.

Toutefois, son implication supposée dans un scandale de corruption avec la compagnie pétrolière Tullow Oil et la supposée commission de 12%, qu’il aurait réclamée à des tiers sur un marché foncier très peu transparent, ont impacté négativement son ascension politique, jusque-là fulgurante.

Le dernier du tableau est, Maître Madické Niang, avocat de profession, ancien ministre des Affaires étrangères et député à l’Assemblée nationale, où il a déjà présidé le groupe parlementaire Liberté et Démocratie, avant d’être débarqué suite à sa candidature (alternative) à la présidentielle de 2019. Il continue à revendiquer son appartenance au PDS, même si le Secrétaire général de ce parti, Me Abdoulaye Wade le lui refuse.

Ses démêlées avec le Pape du Sopi, qui ne lui pardonne pas de se porter candidat, parallèlement à la candidature de Karim Wade, investi régulièrement par le PDS (C’est pourquoi, il se dit candidat alternatif), amenuisent ses chances et le fragilisent auprès de l’électorat sénégalais.

Pour qui vote Wade en 2019 ?

Afrique Confidentielle tient, de source sûre, que Me Abdoulaye Wade et son parti, le PDS ainsi que les mouvements karimistes observeront un boycott stratégique. Il s’agira de ne soutenir -officiellement- aucun candidat, mais d’agir pour favoriser la réélection du candidat Macky Sall.

D’abord, parce que voter Idy 2019, signifierait une sorte de harakiri politique, non seulement pour Karim Wade (fils de l’ancien président Abdoulaye Wade), mais également pour le parti démocratique sénégalais en faveur de Reewmi d’Idrissa Seck.

Voter Me Madické Niang, serait également inconcevable, puisque Wade et son fils Karim le considèrent comme un comploteur contrer leurs intérêts. Issa Sall et Ousmane Sonko sont exclus de l’hypothèse, d’autant Me Wade a toujours soutenu qu’il ne voterait jamais pour un candidat non libéral.

Paradoxalement, il ne reste que Macky Sall pour engranger les voix des militants du PDS et des Mouvements karimistes. Les raisons sont doubles : Macky Sall a déjà fait un mandat et postule un second et dernier mandat (La Constitution sénégalaise limite les mandats présidentiels à deux).

Or, tous les autres candidats pourraient prétendre à deux mandats successifs, s’ils réussissent à se faire élire en 2019, ce qui anéantirait les chances de Karim Wade, en 2024. L’autre raison est que Macky Sall s’est déjà prononcé pour faciliter une amnistie en cas de réélection, pour Karim Wade et l’ancien maire de Dakar Ababacar Khalifa Sall, tous les deux sous le coup d’une peine d’emprisonnement de 6 ans pour le premier et de 5 ans pour le second.

En bon stratège, Me Wade manœuvre pour faire passer le candidat Macky Sall, dès le premier tour, espérant que le compteur sera remis à zéro pour Karim et les autres en 2024.