L’ancien président zimbabwéen affirme, à la veille de l’élection présidentielle, qu’il ne votera pas pour son successeur et ancien collaborateur Emmerson Mnangagwa.
Les Zimbabwéens doivent élire aujourd’hui leur président, députés, conseillers municipaux à l’occasion des premiers scrutins depuis la chute de M. Mugabe. L’ancien homme fort du pays, âgé de 94 ans, est sorti du silence qu’il respectait depuis le début de la campagne électorale, en tenant sa première conférence de presse en direct depuis sa démission forcée.
« J’espère que le vote de demain va faire tomber la forme militaire de gouvernement actuel », a souligné M. Mugabe.
« Je ne peux pas voter pour ceux qui m’ont mal traité », a-t-il poursuivi avant de sous-entendre qu’il donnerait sa voix au candidat du principal parti d’opposition, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC), Nelson Chamisa, dont il a toujours combattu la formation. « Je ne peux pas voter pour la Zanu-PF, le parti au pouvoir depuis l’indépendance du Zimbabwe en 1980 », a expliqué l’ex-chef de l’État et ancien président de la Zanu-PF.
Le plus vieux dirigeant en exercice de la planète avait dû renoncer au pouvoir en novembre, sous la pression de l’armée et de la Zanu-PF. L’armée était intervenue pour empêcher, le moment venu, l’ambitieuse Première dame Grace Mugabe de remplacer son mari nonagénaire. Il a finalement été remplacé par Emmerson Mnangagwa, qu’il avait démis deux semaines plus tôt de ses fonctions de vice-président.
« Ce fut un véritable coup d’État », a lancé dimanche M. Mugabe, jugeant par ailleurs totalement ridicule l’idée qu’il ait voulu faire de son épouse Grace, âgée de 53 ans, son successeur.
Lors d’une intervention à la radio d’État, le président Mnangagwa a indirectement répondu à son prédécesseur en affirmant qu’après des années d’immobilisme, les événements de novembre 2017 avaient donné au Zimbabwe l’occasion de rêver de nouveau.
Il s’est félicité du climat de paix pendant la campagne électorale, contrairement aux précédentes élections sous l’ère Mugabe, entachées de nombreuses violences.
M. Mnangagwa, patron de la Zanu-PF, est donné favori du scrutin, devant M. Chamisa, propulsé récemment à la tête du MDC, à la suite du décès de son leader historique Morgan Tsvangirai, le rival de longue date de M. Mugabe.
Mais l’écart entre les deux principaux candidats à la présidentielle s’est récemment réduit. Le président sortant est crédité de 40% des suffrages, contre 37% pour son principal adversaire, selon un sondage publié il y a dix jours par le groupe Afrobarometer.
Si aucun candidat n’obtient la majorité absolue lundi, un deuxième tour sera organisé le 8 septembre. M. Chamisa, qui veut incarner le changement et la rupture avec l’ancien régime, a accueilli avec prudence et embarras dimanche les propos de l’ancien président Mugabe.
« Ce n’est pas mon devoir en tant que candidat de choisir les électeurs, a-t-il expliqué lors d’une conférence de presse à Harare. Ma principale tâche est d’unir le pays », a-t-il ajouté, avant d’accuser une nouvelle fois la commission électorale de partialité dans la préparation de ces scrutins historiques.
Lors de sa campagne, M. Mnangagwa, 75 ans, a garanti des élections libres, justes et transparentes, en rupture avec les violences et fraudes qui ont caractérisé les derniers scrutins organisés pendant la présidence Mugabe.
Ce dernier a aussi promis l’apogée d’une nouvelle démocratie et des milliards de dollars d’investissement pour remettre sur pied une économie ruinée par les réformes catastrophiques de son prédécesseur.