Dans une lettre ouverte adressée au Ministre de l’Éducation nationale, le Conseil national du Laïcat du Sénégal (CNLS) use d’un langage qui ne sied pas au cadre républicain, dans lequel, il prétend situer le débat. Il se glorifie de 200 ans de présence au Sénégal, sans rappeler que cela n’aurait été possible sans cette hospitalité légendaire des Sénégalais et des Sénégalaises. Il est vrai cependant que la venue du 2ème groupe de Saint Joseph de Cluny à Saint-Louis du Sénégal en 1819, a bénéficié de la couverture des autorités coloniales de l’époque.
Le débat suscité par la mesure d’exclusion annoncée par l’Institution de la Sainte Jeanne d’Arc de Dakar, pour la rentrée prochaine a failli connaître une issue heureuse, depuis que le Ministre de l’Éducation nationale a sorti un communiqué pour rappeler les principes directeurs qui régissent les institutions scolaires évoluant au Sénégal.
En toutes responsabilités, le ministre a reprécisé les règles républicaines que tous ceux qui ont choisi de vivre au Sénégal devraient observer. L’Autorité n’a fort justement cité aucune institution particulière, parce qu’il s’agit de règles générales qui s’appliquent à tout le monde.
La lettre ouverte du CNLS semble mal interpréter ce ton républicain en l’assimilant à un manque de courage : “ Par un communiqué de presse daté du vendredi 3 mai 2019, vous prenez position, avec un empressement déconcertant, sur un débat que vous avez dévoyé de son essence, en mettant au banc des accusés l’Institution Sainte Jeanne D’Arc que, courageusement, vous ne citez pas “, dit le CNLS en guise de premières rafales.
Curieusement, le CNLS emprunte un style qui frise le manque de respect envers une Autorité de la république, qui n’a fait que son devoir, en remettant les pendules à l’heure, alors qu’il est temps. ” En ce qui nous concerne, après avoir pris le temps d’obtenir la bonne information et d’examiner la situation avec responsabilité et discernement, nous vous répondons dans les mêmes formes en vous interpellant directement “, avertit la lettre du CNLS, qui tente -maladroitement- d’argumenter des positions extrémistes, en se trompant de contexte et de pays :
” Depuis un certain temps, les responsables de l’Institution Sainte Jeanne D’Arc de Dakar ont observé des comportements et des pratiques « sectaires » en déphasage avec le caractère laïc de l’État du Sénégal et le VIVRE ENSEMBLE prôné en milieu scolaire. C’est ainsi qu’il a été relevé que certains élèves, identifiables à partir de leur port vestimentaire, se regroupent par affinité et se démarquent de leurs autres camarades. Ces comportements remettent en cause l’impossibilité, jusque-là de mise, de distinguer, de manière visuelle comme comportementale, dans les écoles catholiques, les différences de culture, de religion et de condition sociale entre les élèves “.
En effet, le trait caractéristique d’un musulman ou d’une musulmane et qu’il est -heureusement- identifiable à partir de son port vestimentaire. Les regroupements par affinité, dans les écoles ne sont pas l’apanage des seules filles voilées. Dans n’importer quel milieu scolaire, les élèves se regroupent par affinité. Une telle pratique humaine ne s’explique réellement par le seul fait de porter le voile.
Les pratiques “sectaires” pourraient être constatées partout ailleurs au Sénégal, où se rencontrent des groupes ne partageant pas les mêmes croyances. Cependant, c’est là où le respect mutuel et la tolérance de l’autre sont requis pour la préservation de la paix sociale et l’esprit sacro-saint de la coexistence pacifique.
La démarche du CNLS est à la limite provocatrice. Vouloir accréditer la thèse assimilationniste qui oblige l’autre à vous ressembler pour exister, est une approche d’exclusion, porteuse des germes de la division et de la séparation. La mesure ségrégationniste de l’Institution Sainte Jeanne d’Arc participe à la rupture du contrat social qui a toujours uni, chrétiens et musulmans dans l’espace scolaire sénégalais.
Le communiqué de rappel du Ministre de l’Éducation nationale est bien accueilli par tous les Sénégalais épris de paix, de liberté et du vivre ensemble. Les Sénégalais ont toujours partagé les valeurs de tolérance et du respect mutuel, ciment d’une jeune nation soudée, souvent citée en exemple dans le monde.