L’élection présidentielle, qui devrait donner un successeur à Joseph Kabila, est prévue pour le 23 décembre prochain.

À quelques trois mois de la convocation de l’électorat par la Commission électorale nationale indépendante (Céni), les esprits se surchauffent et les ambitions ne cessent d’être affichées dans les quartiers généraux des partis politiques.

En l’absence des grands leaders et dans l’option d’un éventuel retrait du président Joseph Kabila, la question du « dauphinat » domine les débats. Une curieuse fièvre s’est emparée des grandes universités de Kinshasa ces derniers mois. Les caciques de la majorité s’y pressent pour obtenir un doctorat, puissant sésame dans ce pays qui valorise les titres universitaires parfois jusqu’au fétichisme. Mais après son obtention, le nouveau diplômé est généralement la cible d’attaques et se voit accusé d’avoir triché.

C’est ce qui est arrivé au président de l’Assemblée nationale, Aubin Minaku Ndjalandjoko, en décembre dernier. Puis à l’ancien Premier ministre, Matata Ponyo Mapon, en février. Emmanuel Ramazani Shadary, le chef du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD, au pouvoir), est pour sa part inscrit à l’école doctorale de l’université de Kinshasa depuis 2015.

L’élection présidentielle, qui devrait donner un successeur à Joseph Kabila, n’est pas étrangère à cette agitation. Sa date, officiellement fixée au 23 décembre prochain, demeure encore très incertaine. Mais plusieurs signes tendent à montrer que le chef de l’État envisage désormais de céder son fauteuil, au moins pour un temps.

En décembre, le Parlement a adopté une nouvelle loi électorale qui devrait favoriser les partis riches et puissants comme le sien : elle introduit des seuils de représentativité et relève le montant des cautions à payer pour se porter candidat.

Depuis janvier, les statuts du PPRD ont été réformés, créant un poste de président qui semble taillé sur mesure pour Joseph Kabila après son départ.

Si le calendrier électoral est respecté, le parti devrait désigner son candidat avant le mois d’août. Une étrange campagne a donc commencé, où personne n’est déclaré, mais où coups bas et intoxications pleuvent. Chacun tente de se positionner, en prenant soin de ne pas paraître forcer la main du chef. Tout le monde le sait en effet, lui seul prendra la décision, selon ses propres critères.

Le premier d’entre eux sera sans nul doute la loyauté. Une loyauté aveugle, à n’en pas douter. Joseph Kabila est d’une méfiance extrême et il a des intérêts, notamment économiques, à protéger. La mésaventure de son ancien homologue angolais, José Eduardo dos Santos, rapidement marginalisé après son départ du pouvoir en 2017, qui n’a pu que renforcer sa vigilance.

La popularité est donc à double tranchant : le candidat devra en avoir assez pour se faire élire avec l’appui de la machine étatique, mais pas au point de pouvoir s’émanciper de la tutelle de Joseph Kabila.

L’origine régionale devrait en revanche être déterminante. On dit que le chef de l’État échaudé par la confiance qu’il avait accordée à des personnalités originaires de l’est du pays, comme Vital Kamerhe, Moïse Katumbi et Pierre Lumbi, aujourd’hui passés dans l’opposition.

Par ailleurs, étant donné que la RDC aura eu deux présidents successifs issus du Katanga (Sud-Est), il a tout intérêt à mettre en œuvre une alternance géographique. Vient ensuite le critère sécuritaire, le président sortant entend bien garder le contrôle sur l’armée et les services, ainsi le candidat devra lui faciliter la tâche.