Le Conseil de sécurité de l’ONU s’est montré divisé vendredi sur le retrait de sa force de paix dans la région soudanaise du Darfour (Minuad). Les Européens et Africains réclament sa suspension, tandis que la Chine et la Russie demandent sa poursuite.
Lors d’une réunion du Conseil de sécurité consacrée à la prolongation de la Minuad qui arrive chaque année à échéance fin juin, ses membres européens (Royaume-Uni, Allemagne, France, Belgique) comme ses membres africains (Côte d’Ivoire, Guinée Équatoriale) ont mis en avant les bouleversements en cours pour appeler « à une suspension » du retrait et à un simple « renouvellement technique » du mandat de la mission de paix.
À quelles autorités remettre dans quinze jours les quinze bases de l’ONU restantes au Darfour, s’est interrogée la France alors que le Royaume-Uni appelait à la « prudence ».
Sans se prononcer sur la suite du retrait de la Minuad, les États-Unis ont à nouveau appelé « à un transfert du pouvoir à un gouvernement civil ».
Pour la Chine, « la situation est stable » au Darfour et « il revient au gouvernement soudanais d’assumer la sécurité » dans la région, a dit son représentant. « Le retrait devrait se poursuivre » et s’achever « comme prévu en 2020 », a-t-il ajouté.
La Russie a critiqué la prise de position des Européens, avant même le début des négociations sur la résolution de renouvellement de la Minuad. « Le règlement de la crise intérieure est l’apanage du Soudan, sans interférences extérieures », a souligné Moscou.
Devant le Conseil de sécurité, le Soudan s’est opposé à toute « tentative visant à suspendre le retrait » de la Minuad, soulignant que la situation au Darfour justifiait son départ.
Il y a un an, le Conseil de sécurité s’était mis d’accord pour engager un retrait graduel au Darfour, dans l’ouest du Soudan, de sa force de paix conjointe avec l’Union africaine (7.800 Casques bleus aujourd’hui) devant s’achever fin 2020. La Minuad est déployée au Darfour depuis 2007 et a compté jusqu’à 16.000 Casques bleus.
Depuis 2018, la situation politique s’est considérablement transformée au Soudan avec la prise du pouvoir par des militaires et une négociation avec un mouvement de contestation civile qui semble actuellement dans l’impasse.
Cette semaine, les ONG Amnesty International et Human Rights Watch avaient appelé l’ONU à interrompre le retrait de la Minuad dans un contexte de répression accrue au Soudan, notamment par des individus en uniformes soupçonnés de liens avec les milices Janjawid accusées d’exactions au Darfour.
Le Darfour est déchiré depuis 2003 par un conflit opposant les forces soudanaises à des rebelles issus de minorités ethniques et s’estimant marginalisés par le pouvoir central. Selon les Nations unies, le conflit au Darfour a fait environ 300.000 morts et plus de 2,5 millions de déplacés.