Les responsables militaires et religieux éthiopiens ont rendu hommage au chef d’état-major de l’armée, condamnant son assassinat et ceux de responsables régionaux samedi, lors d’une cérémonie chargée d’émotion.
Quelques heures plus tard, des milliers de personnes ont accueilli la dépouille du chef d’état-major, Seare Mekonnen, à Mekele, dans sa région natale du Tigré (nord). Le chef du gouvernement éthiopien, dont le programme réformiste et progressiste a reçu une gifle avec les assassinats politiques de samedi, a essuyé ses larmes avec un mouchoir blanc durant cette cérémonie en l’honneur de Seare Mekonnen et d’un général à la retraite tué en même temps que lui.
« Le crime n’a pas été commis par des forces étrangères, mais par notre propre peuple, et cela le rend encore plus douloureux », a déclaré Abune Mathias, le patriarche de l’Église orthodoxe, devant plus de 1.000 personnes, principalement des soldats et des proches des deux hommes.
Le général Seare Mekonnen a été tué par son garde du corps alors qu’il organisait la réponse à une attaque menée dans l’après-midi à Bahir Dar (nord-ouest) contre une réunion de hauts responsables de la région Amhara. Le président de cette région, Ambachew Mekonnen, un de ses conseillers et le procureur général régional, Migbaru Kebede, qui participaient à cette réunion, ont été tués dans cette attaque.
Les attaques de Bahir Dar et d’Addis-Abeba étaient coordonnées, estiment les autorités. Elles évoquent une « tentative de coup d’État » contre le gouvernement de la région Amhara, une des neuf régions du pays dessinées sur les bases d’un fédéralisme ethnique.
Le lien entre les deux attaques et les motifs de celle contre le général Seare restent à éclaircir. Les observateurs ont émis des doutes sur la théorie de la tentative de coup d’État. Mais tous s’accordent pour dire que ces événements s’inscrivent dans le cadre des tensions politico-ethniques en Éthiopie qui ont fait plus de deux millions de déplacés.
Le Tigré, la région la plus septentrionale du pays, est la région d’une minorité ethnique qui, jusqu’à l’arrivée au pouvoir de Abiy, était considérée comme la plus puissante au sein du parti au pouvoir. Les Tigréens sont accusés d’avoir marginalisé les Oromo et les Amhara, les deux principaux groupes ethniques. Abiy Ahmed s’est efforcé depuis son entrée en fonction en avril 2018 de démocratiser le pays, légalisant des groupes dissidents et améliorant la liberté de la presse. Mais cet assouplissement a également permis une expression plus libre des tensions intercommunautaires.