Le parti d’inspiration islamiste Ennahda, principale force au Parlement tunisien, a appelé à « faire barrage à la corruption » aux prochaines législatives.

La Tunisie s’apprête à vivre un octobre électoral. Le 6 octobre, ils seront appelés à élire les 217 députés de l’Assemblée des représentants du peuple. Il s’agit d’un scrutin avec des enjeux importants.

Un parti comme Ennahda, a toujours privilégié les législatives à la présidentielle, compte tenu du poids constitutionnel que revêt l’hémicycle tunisien. Nul doute que la bataille électorale sera rude entre ces grands partis classiques (Nidaa Tounès, Ennahda, etc.) qui ont subi un revers cuisant lors du premier tour de l’élection présidentielle en cours.

Le 13 octobre, les électeurs tunisiens départageront les 2 candidats anti-système  Saïd Kaïs et Nabil karaoui, dans un scrutin assez controversé. Nabil karaoui, en prison depuis le 23 août dernier, a vu sa nouvelle demande de liberté provisoire rejetée par les juges. Il risque de passer la journée du 13 octobre en prison, même si ses partisans menacent de ne pas laisser passer le scrutin si leur candidat n’est pas élargi de prison.

Les défenseurs des droits de l’homme fustigent l’inégalité des chances entre un candidat emprisonné et un autre, libre de ses mouvements. L’ISIE ( Instance Supérieure Indépendante pour les Élections) a même souhaité la libération de Nabil afin de garantir l’égalité des chances entre les deux protagonistes, tout en reconnaissant qu’au cas contraire, l’élection pourrait être valide. Pourtant, les avocats de Nabil affutent déjà leurs armes et s’apprêtent à déposer des recours en cas de défaite de leur client.

Choix entre simplicité et exubérance 

Le scrutin du 13 octobre va opposer deux hommes, qui, même s’ils partagent le qualificatif d’être anti-système, il n’en demeure pas moins qu’ils ont deux postures diamétralement opposées.

L’homme d’affaires Nabil karaoui est un play-boy mafieux, qui surfe dans une exubérance insolente, en dépit de son penchant pour les actions caritatives. Ayant fait des études commerciales, il s’est consacré aux affaires avec son frère, devenu son co-associé.

Ses actions caritatives et sa célèbre chaîne de télévision NessmaTV ont fait de lui une star, connue par le grand public. Emprisonné pour fraude et blanchiment d’argent, il serait absurde de croire qu’une fois élu, il serait un champion de lutte contre la corruption qui gangrène de manière chronique l’administration tunisienne.

Le Professeur Saïd Kaïs, est un homme austère qui prêche la simplicité et l’attachement aux valeurs tunisiennes. Conservateur, il s’oppose à la légalisation de l’homosexualité et l’abolition de la peine de mort. Sans être salafiste, il est rigoureusement favorable aux valeurs islamiques qui fondent l’essence même de la personnalité tunisienne.

Constitutionnaliste imbu des droits humains, Saïd Kaïs prône la démocratie et le respect des libertés individuelles. Sa simplicité légendaire a sûrement convaincu certains jeunes tunisiens à voter pour lui, espérant, qu’une fois au pouvoir, il combattra la corruption et la concussion qui minent la société Tunisie. Reste à savoir si Kaïs le président aura les mêmes préoccupations que Kaïs le candidat.

Ennahda, front du candidat Abdelfattah Mourou, qui est arrivé en 3ème position avec un peu plus de 12% au premier tour, a déjà appelé à voter pour Saïd Kaïs, tout comme d’autres petits candidats.

Surclassant ses concurrents au premier tour pour avoir recueilli plus de 18% des voix, Saïd Kaïs est naturellement le favori du second tour, d’autant que son rival Nabil karaoui risque de suivre la campagne électorale pour le 2ème tour, à partir de sa cellule de prison.

La victoire de l’un ou l’autre des deux candidats en lice, signifierait que les Tunisiens veulent désormais être dirigés autrement.

La déception de la classe moyenne tunisienne, née des errements des régimes politiques qui se sont succédé au pouvoir depuis la révolution du Printemps arabe de 2011, aura favorisé l’ascension fulgurante d’un candidat comme Kaïs, qui ne dispose même pas d’un appareil politique formel.