Pressenti comme une vitrine de la démocratie en Afrique de l’Ouest, le Sénégal a inscrit le principe du statut de chef de file de l’opposition, dans sa constitution, depuis le référendum de mars 2016. Cependant, il traîne encore les pieds pour traduire ce principe constitutionnel dans la vie politique quotidienne. C’est que, le pays traverse une transition et un renouvellement de la classe politique, ce qui explique le manque de maturité qui caractérise la nouvelle opposition sénégalaise. Le débat ainsi ouvert porte sur la meilleure voie (présidentielle ou parlementaire) pour déterminer le profil du chef de file de l’opposition.
Certains juristes avancent que celui qui vient en deuxième position dans l’élection présidentielle, serait plus indiqué pour être le chef de l’opposition, d’autant que celui qui définit la politique de la nation n’est autre que le chef de l’exécutif (le président de la république). L’opposition se définit comme étant toutes autres formations politiques qui optent pour des projets politiques différents de celui du président de la république.
Si l’on adopte cette hypothèse Idrissa Seck, du parti Reewmi, serait le prochain chef de file de l’opposition, pour avoir occupé la deuxième place à l’élection présidentielle du 24 février 2019. Pourtant, la voie parlementaire semble plus pertinente pour le cas du Sénégal. Notre code électoral admet des candidatures indépendantes, donc non adossées à des partis politiques ou des coalitions de partis.
Si un tel candidat sort deuxième dans une élection présidentielle, il pourrait, dès lors être désigné chef de file de l’opposition, sans pour autant disposer d’un parti. Dans un tel cas, il serait difficile d’en faire le chef de file de l’opposition. En revanche, le parti ou la coalition de partis qui occupe la deuxième place à l’Assemblée nationale, disposerait certainement de plusieurs députés qui participent à l’animation du débat politique au sein de l’hémicycle, véritable tribune pour un dialogue politique permanent et un creuset approprié pour la confrontation des différents projets politiques.
Car, si le chef de l’exécutif définit la politique de la nation, les tenants du pouvoir législatif, représentants légitimes du peuple, en déterminent les moyens qui permettent sa mise en œuvre. Le rôle politique d’un candidat à la présidentielle pourrait prendre fin après la publication des résultats définitifs, alors que celui des députés, y compris ceux de l’opposition, se poursuit durant tout leur mandat.
Si l’on adopte ce schémas qui privilégie la voie parlementaire, c’est bien le secrétaire général national du Parti démocratique sénégalais (PDS), notamment Me Abdoulaye Wade qui en serait le titulaire, en attendant de passer la main à son fils Karim Wade ou la tenue des prochaines élections législatives, qui pourraient déboucher sur une nouvelle configuration politique.
En tout état de cause, il sera difficile, à l’heure qu’il est, de trancher cette question fondamentale, si l’opposition sénégalaise continue à boycotter tous les appels au dialogue du Président Macky Sall.
Le Sénégal dans ce domaine précis, serait le dernier de la classe dans la sous-région, si l’on sait que le Mali, la Guinée et la Mauritanie ont déjà définitivement réglé ce problème du statut de chef de file de l’opposition.
Au Sénégal, une partie de l’opposition poursuit sa politique de la chaise vide, dans toutes les grandes concertations, initiées par celui qui définit-constitutionnellement- la politique de la nation. Cette posture bloquante, obstrue évidemment, toutes les voies qui mènent vers des solutions concertées.
Espérons que l’appel au dialogue inclusif, lancé par le chef de l’État, serait cette fois, entendu par l’opposition qui semble se chercher une voie qu’elle tarde à trouver !