Le ciel politique gambien s’est brutalement assombri, ce jour, avec l’annonce, par la présidence, du limogeage du vice-président Oussainou Darboe et de trois ministres. Cet événement met sens dessus-dessous le microcosme gambien et pourrait impulser une dynamique déstabilisatrice.
En effet, Oussainou Darboe est le patron du parti majoritaire à l’Assemblée nationale où il compte 31 sièges sur 53 et, il est aussi le mentor de Barrow. La candidature de ce dernier à la présidentielle de 2016, n’a été possible que parce que Darboe était empêché car le dictateur Yaya Jammeh l’avait arrêté et incarcéré.
Candidat de substitution, Barrow avait créé la surprise en remportant la présidentielle face à Jammeh, avec un score de plus de 43%, à l’issue de l’unique tour de scrutin. Bien des péripéties après, Jammeh avait fini par être exilé en Guinée-Équatoriale et Barrow, installé dans ses nouvelles fonctions de chef de l’État.
Darboe fut élargi et nommé à la vice-présidence.
Opposant historique, avocat de formation et militant chevronné des droits de l’homme, il était, de facto, la « référence du nouveau régime démocratique ». Mais le président élu est bien l’inexpérimenté Adama Barrow qui, pendant la campagne électorale avait déclaré qu’il n’allait faire qu’un mandat de transition de 3 ans.
Depuis un moment, les partisans de Darboe lui rappelle son engagement et avaient fini par l’agacer sérieusement.
Le coup d’éclat du jour est aussi un acte d’autorité qui clarifie la situation politique du pays. Le « bicéphalisme » apparent que semblaient incarner le « couple » Barrow/Darboe s’effondre et le président de la république assume ses prérogatives, avec force.
Le bicéphalisme finit toujours par un clash, car le pouvoir ne se partage pas.
Mais le cas gambien est complexe et le comportement des députés majoritaires du parti UDP de Darboe, va être déterminant. S’ils s’alignent avec Barrow, celui-ci pourra continuer à gouverner le pays, sans grande difficulté.
Cependant s’ils choisissent le camp du patron légitime du parti, une forme de cohabitation va s’imposer, avec de sérieuses menaces de déstabilisation de la Gambie.
Yaya Jammeh, qui a encore des capacités de nuisance, va essayer de souffler sur les braises pour attiser le feu de cette nouvelle bataille au sommet, entre ses tombeurs. Tous les pays de la sous-région sont interpellés pour aider à calmer le jeu. Le problème est de savoir, qu’est-ce qu’ils peuvent faire, après que le divorce Barrow /Darboe est acté ?
Peut-être, demander aux uns et aux autres de ne pas envenimer la situation et, de s’en tenir aux armes légales du combat démocratique et d’attendre les échéances électorales pour se positionner.
Autrement, les « libérateurs » d’hier seraient en porte à faux par rapport aux principes démocratiques qu’ils mettaient en exergue pour s’opposer à Jammeh, pour le combattre et le vaincre.
Le nouveau duel Barrow/Darboe devrait être arbitré par les urnes, quand le moment viendra, à la fin du mandat officiel du président élu.