Le président burundais, Pierre Nkurunziza, veut modifier la constitution, pour briguer un nouveau mandat.

Les Burundais sont appelés à s’exprimer aujourd’hui sur la réforme constitutionnelle imposée par le président Pierre Nkurunziza. La campagne, marquée par des violences, prépare l’adoption d’un texte ouvrant à l’instauration de la monarchie.

Il est impensable que son référendum lui échappe. Pierre Nkurunziza, président depuis 2005, en veut toujours plus. Il a déjà été réélu pour un troisième mandat, en 2015, en tordant les règles de la Constitution. Mais pour continuer à diriger le Burundi, il devait réécrire la loi fondamentale. Ce sera très certainement chose faite après la consultation organisée ce jeudi.

Toute la machine du parti au pouvoir, le CNDD-FDD, a été mobilisée. Or au Burundi, la formation présidentielle a une influence sans égale : elle est même, à bien des égards, plus puissante que l’État lui-même.

Dans les collines, son ancrage territorial est énorme. Sa propagande est très efficace, mêlant le politique et le religieux, explique le chercheur indépendant Mathieu Boloquy. L’issue du vote ne fait aucun doute. Le « oui » va l’emporter, largement.

Un texte référendaire quasi inaccessible

« Celui qui osera s’opposer au projet de révision de la Constitution en subira les conséquences », avait prévenu Nkurunziza lors de l’annonce du référendum, en décembre. Il a tenu promesse.

Les rassemblements de l’opposition ont été souvent interdits, et systématiquement perturbés. Des militants ont été arrêtés ou ont disparu. « On a reçu des menaces, des intimidations, les Imbonerakure établissaient des barrières pour empêcher les gens de venir à nos meetings » raconte Agathon Rwasa, le leader du camp du «non» et le seul opposant burundais d’envergure à ne pas vivre en exil.

Une bonne partie de l’administration ne fait plus la différence entre « la nation et le parti au pouvoir ». La vague de répression qui s’est abattue sur le pays depuis 2015 après les manifestations contre le troisième mandat de Nkurunziza, puis une tentative avortée de coup d’État, s’est encore durcie à l’approche du scrutin.

La FIDH, qui est interdite de séjour au Burundi mais s’appuie sur un réseau d’observateurs locaux clandestins, a recensé 1 710 assassinats, 486 cas de disparitions forcées et 8 561 arrestations arbitraires en trois ans.

La plupart de ces crimes sont commis par le Service national de renseignement (SNR) ou les Imbonerakure, qui font régner la terreur en toute impunité.

« La police ne fait rien sans leur en référer, explique Anne-Claire Courtois, historienne au Laboratoire des Afriques dans le monde. Ils représentent à la fois une forme d’ordre et de protection, car on vient les voir pour régler des problèmes, mais aussi un danger, car ils agissent en toute impunité, disposent du monopole de la violence physique, et créent la plupart du temps eux-mêmes des problèmes. »

Présidence à vie ?

La nouvelle constitution soumis au référendum a sauté le verrou de la limitation du mandat présidentiel qui passe de cinq à sept ans renouvelable une seule fois.
Ce qui permettrait à Pierre Nkurunziza, au pouvoir depuis 2005, de briguer deux autres mandats à l’expiration de celui en cours en 2020. Cette disposition pourrait lui assurer 14 autres années de pouvoir supplémentaires à la tête du pays.