Alors que débute sa deuxième année au pouvoir, le Premier ministre Abiy Ahmed fait face à un nouveau défi : tenir sa promesse d’organiser en 2020 des élections libres et régulières malgré la violence politique croissante.
Le Premier ministre éthiopien, investi le 2 avril 2018, a succédé à Hailemariam Desalegn, qui avait démissionné dans un contexte de dissensions croissantes au sein de l’EPRDF et après plus de deux années de manifestations antigouvernementales.
Lors de son premier discours en tant que Premier ministre, en avril 2018, Abiy Ahmed avait appelé à en finir avec l’ancienne politique de répression et d’exclusion qui avait plongé l’Éthiopie dans la tourmente.
Un engagement qui lui avait valu la considération de la communauté internationale et une popularité si grande dans son pays que ses plus fervents supporters le rêvaient en Prix Nobel de la paix.
Mais cette première année au pouvoir a également été marquée par un regain de violences ethniques qui ont forcé 1,8 million de personnes à quitter leur foyer.
Peu de temps après sa prise de fonction, un vieux conflit foncier a débouché sur des affrontements ethniques dans les régions de Guji et de Gedeo, au sud du pays, forçant près d’un million de personnes à fuir leur foyer. L’année écoulée a été ponctuée de violences similaires.
En septembre dernier, au moins 58 personnes, principalement issues d’ethnies minoritaires, ont été tuées aux abords de la capitale Addis-Abeba, tandis qu’en décembre, selon des ONG, 250.000 personnes ont été déplacées dans l’ouest du pays en raison de violences ethniques.
Selon les analystes, la violence croissante résulte d’un relâchement du contrôle, autrefois ferme, de l’EPRDF sur les forces de sécurité et les administrations régionales. L’instabilité politique va jusqu’à menacer les progrès en faveur de la liberté de la presse insufflés par le Premier ministre. Il s’inscrit à ce sujet dans les pas de Hailemariam Desalegn, qui avait fait sortir de prison plusieurs éminents journalistes.
Elias Kifle, qui dirige le média en ligne Mereja, raconte ainsi que des officiers de police ont battu deux de ses journalistes lors d’une manifestation dans la ville de Legetafo en février.
“Je considère que c’est non seulement une attaque contre la presse, mais aussi contre la réforme“, dit-il, ajoutant ne pas tenir le Premier ministre pour responsable de cette bavure.
Signe manifeste de fragilité, les autorités ont repoussé au dernier moment, en mars, un recensement national prévu le même mois et qui était perçu comme un prélude aux élections de 2020.
« Quoi qu’il arrive on sera perdant », estime Hassen Hussein, du Front démocratique Oromo, cité par l’AFP. « Avec le niveau de polarisation qui existe aujourd’hui, je ne suis pas certain qu’une élection serait une bonne chose pour l’Éthiopie et pour les Éthiopiens ».