S’exprimer librement au Sénégal devient un droit démocratique menacé par le nouveau régime Diomaye/Sonko, qui semble allergique à la critique et le fait savoir aux journalistes, chroniqueurs et autres personnalités habituées à s’exprimer dans les médias.

Au moment où ces lignes sont écrites, Badara Gadiaga, chroniqueur attitré de la célèbre émission « DIAKARLO » (face-à-face), est convoqué par la section de la cybercriminalité à Dakar.

Pourquoi une telle convocation dans un service de police censé traquer les cybercriminels ?

Gadiaga avait eu un échange houleux avec le député Amadou Ba, membre du parti Pastef (au pouvoir), et lui avait retourné, comme un boomerang, ses propres déclarations et commentaires sur l’« affaire Sonko/Adji Sarr », un fait divers qui avait secoué le microcosme sénégalais.

Cette affaire n’est toujours pas « bouclée » sur le plan judiciaire. Sonko, condamné par contumace à deux ans de prison pour « corruption de la jeunesse », a vu son procès « anéanti » à la suite de son arrestation et de sa contestation du verdict.

En toute logique judiciaire, un nouveau procès devrait être organisé sur cette affaire, qui continue de susciter interrogations et polémiques.

C’est dans ce contexte que Gadiaga et Amadou Ba se sont livrés à un véritable duel verbal lors de l’émission, devenue un rendez-vous prisé des joutes oratoires, que les Sénégalais affectionnent tant.

Ce qui étonne aujourd’hui, c’est que ceux qui profitaient hier des médias pour se faire connaître et mobiliser leurs troupes lorsqu’ils étaient dans l’opposition, évitent désormais tout débat libre et se crispent à la moindre critique.

Il est vrai qu’ils n’ont plus de promesses creuses à vendre à une jeunesse désabusée.

Cette jeunesse, meurtrie par la déception, cherche aujourd’hui à émigrer et n’écoute plus les « marchands de sable » d’hier, incapables de proposer un projet ou de créer des emplois.

La répression actuelle est le symptôme de l’échec politique d’un régime en panne de discours.

Face à cela, il se tourne vers la menace et les arrestations arbitraires, déguisées en gardes à vue, mandats de dépôt ou détentions « en attente de jugement » — autant de manœuvres lamentables.

C’est ainsi que le journaliste Bachir Fofana et l’ex-président du groupe parlementaire de l’ancien régime, Moustapha Diakhaté, toujours en détention, voient leur procès reporté au 16 juillet, « parce que les greffiers sont en grève ».

Hier encore, Madiambal Diagne, patron du groupe de presse Avenir Communication, a été entendu par la Cybersécurité. Il en est sorti libre et a affirmé que les tentatives d’intimidation visant à le faire taire sont vouées à l’échec. Il continuera à s’exprimer librement.

Comme tous les Sénégalais attachés à l’exercice de ce droit démocratique.

La stratégie qui consiste à museler les médias ne prospérera jamais au Sénégal, un pays de liberté, de dialogue et de débats.

Sonko, qui a usé et abusé des micros et des réseaux sociaux, devrait en être le premier conscient.