
L’ancien président de la RD Congo, revenu au bercail à la surprise générale et installé dans l’Est du pays conquis par les rebelles du M23, mène des activités politiques que les analystes peinent à décrypter.
Dénoncé par le gouvernement du président Félix Tshisekedi, qui l’accuse de collusion avec les rebelles — ennemis de la nation — et a logiquement levé son immunité sénatoriale, il n’en reste pas moins imperturbable dans son action sur le terrain.
Le fait que les rebelles le laissent faire (organisation de rencontres avec les forces vives de la localité, propositions de jouer les émissaires pour restaurer la paix, entre autres) donne du grain à moudre aux partisans de Tshisekedi, qui affirment qu’il est de mèche avec le M23.
En tout cas, il s’est installé et se déplace sans aucune difficulté dans une zone récemment encore en proie à une violence sanglante, où des milliers de personnes ont été tuées et des centaines de milliers forcées à partir en exil.
La démarche de Kabila est assurément politique et trahit une volonté de vouloir reconquérir le pouvoir qu’il avait quitté à la suite d’élections contestées, mais qui ont tout de même abouti à son départ du pouvoir après 18 ans de règne.
À la tête d’une fortune supposée colossale, avec sa famille, il a des arguments qui sont solides dans ce pays en guerre.
Mais peut-il ignorer l’engagement américain, qui a freiné le Rwanda — soutien militaire bien identifié du M23 — et imposé un dialogue qui a permis la rencontre à Doha entre les présidents Kagamé et Tshisekedi ?
Après la signature d’accords de coopération portant notamment sur l’exploitation minière avec les USA, et les sanctions imposées à des officiels rwandais, comme James Kabarebe, qui assure la liaison avec le M23, Kabila peut-il douter de l’engagement américain ? Et de la détermination de Washington à piloter un processus de paix dans le pays ?
Que peut espérer Kabila dans un tel contexte, si l’on sait qu’il avait été forcé à quitter le pouvoir par la quasi-totalité de la communauté internationale, qui avait dénoncé la corruption de son régime et l’enrichissement de sa famille ?
Un retour de Kabila est hautement improbable, même si sa capacité de nuisance reste importante.
Kabila semble n’en faire qu’à sa tête et multiplie les provocations dans l’Est du pays.
Dans le collimateur de la justice, après la levée de son immunité, il risque gros s’il s’aventure dans le reste du pays — peut-être à l’exception du Katanga, sa région familiale.
Quoi qu’il en soit, Kabila est bien un facteur de trouble en RD Congo, où ses mandats présidentiels prolongés n’ont apporté ni la paix, ni l’embellie économique.
Son retour, qui n’est pas souhaité, est un coup de poker dangereux qu’il tente à ses risques et périls.
Mais, en Afrique centrale, quitter le pouvoir et jouir d’une retraite bien méritée serait une exception, au milieu des « dynasties démocratiques ».