À Abidjan, la 13ᵉ édition de la CGECI Academy, placée sous le thème « Souveraineté économique : le temps de l’action », a rappelé avec force que la souveraineté numérique n’est plus une option pour l’Afrique mais une nécessité vitale. Chercheurs, responsables publics et opérateurs privés ont appelé à une synergie accrue pour transformer l’innovation scientifique et technologique en levier concret d’indépendance économique et politique.
Le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique de Côte d’Ivoire, Adama Diawara, a dressé un constat sans détour : « L’objectif continental est d’allouer 1 % du PIB à la recherche, mais la Côte d’Ivoire, comme la majorité des pays africains, reste en deçà, avec moins de 0,5 % ». Derrière cette statistique se joue un enjeu majeur : sans investissement soutenu, l’Afrique risque de rester dépendante des infrastructures numériques et des solutions importées, au détriment de sa sécurité et de sa compétitivité.
Pour le ministre, il ne suffit pas de produire de la recherche scientifique, encore faut-il la relier au tissu productif. Or, faute de liens solides avec les entreprises, les publications restent sans véritable impact économique. La création du Fonds pour la science, la technologie et l’innovation (FONSTI), doté de 10 milliards de FCFA, et d’une enveloppe annuelle de 1,5 milliard de FCFA pour financer des projets de recherche constitue un signal positif, mais encore insuffisant face aux besoins.
C’est précisément ce fossé que les acteurs privés entendent combler. Pacôme Boidi, représentant d’Orange Côte d’Ivoire, a rappelé que l’opérateur mise sur un réseau régional de fibre optique, 11 Digital Centers et fablabs pour soutenir l’émergence de start-up et de PME innovantes capables de rivaliser avec les géants internationaux. Au-delà de la simple connectivité, Orange investit dans des data centers, des solutions numériques pour l’éducation, la santé, l’agriculture, ainsi que dans la finance digitale via Orange Bank. Autant d’initiatives qui s’inscrivent dans une logique de construction d’une autonomie numérique africaine.
Ce dialogue entre chercheurs, pouvoirs publics et entreprises fait apparaître un consensus : la souveraineté numérique est au cœur de la souveraineté économique et politique du continent. Elle conditionne la protection des données, la sécurité des infrastructures stratégiques et la capacité des pays africains à définir leurs propres priorités. Sans maîtrise locale des technologies et sans écosystèmes numériques robustes, l’Afrique resterait exposée à des dépendances lourdes vis-à-vis d’acteurs extérieurs.
Le panel d’Abidjan a ainsi réaffirmé que le futur du continent ne se joue pas seulement dans ses mines ou ses terres agricoles, mais aussi dans ses câbles de fibre optique, ses data centers et ses laboratoires de recherche. La souveraineté numérique, loin d’être un slogan, devient l’un des socles de l’indépendance africaine au XXIᵉ siècle.