
L’expulsion par l’Afrique du Sud de sept ressortissants kényans impliqués dans le programme américain de relocalisation des Afrikaners ouvre un nouvel épisode de tension entre Pretoria et Washington, alors que les relations bilatérales traversent l’une de leurs périodes les plus dégradées depuis la fin de l’apartheid.
Selon le ministère sud-africain de l’Intérieur, les personnes concernées étaient entrées sur le territoire avec des visas touristiques avant d’exercer illégalement des activités liées au traitement de dossiers de départ vers les États-Unis de candidats présentés comme des « réfugiés ». Washington s’appuie, pour ce programme sensible, sur l’ONG RSC Africa, basée au Kenya. Les sept ressortissants kényans ont quitté le pays après avoir signé leurs avis d’expulsion et se voient désormais interdire l’entrée en Afrique du Sud pour cinq ans.
Sur le fond, Pretoria affirme faire respecter strictement son droit des étrangers. Mais le contexte confère à cette affaire une portée diplomatique bien plus large. L’administration du président américain Donald Trump soutient ouvertement la thèse d’une prétendue « persécution » des Afrikaners, une position que les autorités sud-africaines rejettent fermement. Cette divergence narrative a déjà conduit Washington à boycotter un sommet du G20 à Johannesburg et à exclure l’Afrique du Sud des premières réunions techniques sous présidence américaine.
La réaction du département d’État américain ne s’est pas fait attendre. Son porte-parole adjoint, Tommy Pigott, a dénoncé une « interférence inacceptable » dans les opérations américaines d’accueil de réfugiés, tout en indiquant attendre la confirmation de l’ensemble des faits. Une déclaration perçue à Pretoria comme un signal politique, plutôt qu’une simple mise au point administrative.
Cette nouvelle friction s’ajoute à une série de différends déjà lourds. Les États-Unis ont imposé des droits de douane de 30 % sur certains produits sud-africains, un niveau inédit en Afrique subsaharienne. Washington reproche également à Pretoria sa plainte pour « génocide » contre Israël devant la Cour internationale de justice, un acte diplomatique qui a durablement crispé les relations.
Le climat s’est encore détérioré en mars dernier avec l’expulsion de l’ambassadeur sud-africain à Washington, Ebrahim Rasool, après ses propos accusant Donald Trump de mobiliser un discours à connotation suprémaciste. Depuis, l’Afrique du Sud ne dispose plus d’ambassadeur aux États-Unis, illustrant la profondeur de la rupture.
Dans ce contexte, la décision américaine de réduire drastiquement le quota de réfugiés accueillis en 2026 à 7.500, en privilégiant explicitement les Afrikaners, apparaît à Pretoria comme une instrumentalisation politique d’un dossier migratoire sensible.
Si les autorités sud-africaines assurent qu’aucun agent américain n’a été interpellé et que l’opération n’a visé que des infractions administratives, l’épisode souligne une réalité plus large : au-delà d’un simple contentieux migratoire, Pretoria et Washington s’éloignent sur des lignes diplomatiques désormais ouvertement antagonistes.













