L’Union africaine (UA) a franchi une nouvelle étape dans sa stratégie numérique en scellant un partenariat inédit avec la GSM Association (GSMA). Objectif : réduire les fractures qui freinent l’accès au numérique et mobiliser les investissements nécessaires pour bâtir les infrastructures de demain.
Un continent encore déconnecté
Si la connectivité progresse, la fracture reste abyssale : plus de 840 millions d’Africains demeurent encore hors ligne. Dans les zones rurales, où la couverture 4G plafonne à 48 %, l’écart avec les centres urbains s’accroît. Selon le Parlement panafricain, basé à Johannesburg, combler ce déficit nécessitera des financements ciblés, mais aussi des réformes réglementaires capables de réduire drastiquement les coûts : dans certains marchés, elles pourraient faire passer les besoins d’investissement de 200 à seulement 30 millions de dollars.
L’enjeu dépasse la seule question d’accès : le numérique est désormais considéré comme un levier central d’intégration économique, de productivité et de gouvernance. À l’horizon 2030, le simple rattrapage de l’écart d’utilisation pourrait générer 700 millions de dollars supplémentaires de PIB pour le continent.
Une initiative ancrée dans l’Agenda 2063
Le partenariat UA-GSMA s’inscrit dans la vision d’un marché unique numérique africain d’ici 2030, pleinement intégré au deuxième plan décennal de l’Agenda 2063. L’accord prévoit un appui technique d’un an, centré sur la gouvernance et les infrastructures numériques.
La réunion de lancement, coprésidée par Lerato D. Mataboge, Commissaire de l’UA aux infrastructures et à l’énergie, et Caroline Mbugua, directrice principale à GSMA pour l’Afrique, a réuni des décideurs politiques, des opérateurs mobiles et des experts du secteur. Une démonstration concrète d’un dialogue public-privé qui se veut moteur de changement.
Pour Mataboge, l’ambition est claire : « Toutes les collaborations doivent être visionnaires et conçues non seulement pour répondre aux besoins actuels, mais aussi pour anticiper et façonner l’avenir numérique de l’Afrique pour les générations futures. »
De son côté, Caroline Mbugua a insisté sur la nécessité d’élaborer une feuille de route collaborative afin que « la transformation numérique profite à tous les Africains, sans exclusion ».
Données, IA et réformes politiques au cœur du plan
Le projet mise sur une approche fondée sur les données. L’Indice numérique de l’Afrique servira de boussole pour orienter les politiques publiques, améliorer la gestion du spectre, et créer un cadre propice aux investissements dans les infrastructures, l’intelligence artificielle et les compétences numériques.
Outre l’aspect technologique, l’accord met l’accent sur la formation et le renforcement des capacités. Des dialogues sur la fiscalité numérique, des plans d’investissement sectoriels et des programmes de développement des compétences sont prévus pour ancrer la transformation dans la durée.
Une dynamique déjà en marche
Les avancées récentes confirment le potentiel. En cinq ans, la couverture 4G est passée de 41 % en 2019 à 84 % en 2024. Mais le retard persistant dans les zones rurales rappelle que l’enjeu n’est pas seulement technologique : il est aussi social, politique et économique.
Au-delà des infrastructures, l’UA multiplie les cadres stratégiques – Stratégie de transformation numérique pour l’Afrique, Pacte numérique pour l’Afrique, Stratégie sur l’intelligence artificielle – pour harmoniser les réglementations et accélérer le déploiement de solutions dans l’éducation, la santé, l’agriculture ou le commerce.