Le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian a été reçu par Nasser Bourita.

« Le Ministre des Affaires étrangères, de la Coopération Africaine et des Marocains Résidant à l’Étranger, M. Nasser Bourita, a reçu, jeudi au siège du Ministère à Rabat, M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères de la République française. Les deux ministres ont examiné, à cette occasion, les différents aspects des relations bilatérales ». C’est la seule dépêche de la très officielle agence Maghreb Presse (MAP) pour annoncer la visite du chef de la diplomatie française à Rabat le 21 novembre dernier.

Et ce n’est pas tout, le point de presse habituel au ministère des affaires étrangères à Rabat n’a pas été organisé. Les entretiens avec la presse, prévus à l’avance avec Le Drian ont été annulés. Des signes annonciateurs d’une nouvelle crise qui ne dit pas son nom entre les deux pays.

Aux origines de la crise

Dans son édition du 2 décembre, le journal marocain « l’économiste » rapportait que « le projet de future ligne LGV Marrakech-Agadir fait l’objet d’une guéguerre de lobbying tous azimuts entre la France et la Chine. De sources concordantes, « Pékin se positionne en coulisses à travers une société publique (China Railway Construction) spécialisée dans les infrastructures ferroviaires ». Les coûts compétitifs des entreprises chinoises et leur lobbying intensif au Maroc plaident en faveur d’un TGV made in China au Maroc. Si cela se confirme, la France et la SNCF risquent de perdre un gros marché dans le Royaume ».

Selon plusieurs observateurs, c’est ce projet, annoncé par le Roi Mohammed VI en personne le 6 novembre dernier à l’occasion d’un discours adressé à la nation, qui a déclenché la crise entre Rabat et Paris. Comme ce fut le cas pour la première ligne LGV entre Tanger et Casablanca, la France tente de nouveau de s’imposer, avec tous les moyens possibles.

Les médias français sont allés jusqu’à s’ouvrir complètement sur les ennemis de l’unité territoriale du Maroc. Dans une démarche sans précédent, l’agence française de presse est partie jusqu’à qualifier la célèbre militante du front polisario de la «Ghandi du Sahara occidental ».

La réponse marocaine n’a pas tardé. L’agence MAP a rapidement riposté par une dépêche à son tour. Fustigeant la sortie hasardeuse de l’AFP au moment où la communauté internationale soutient la solution politique au Sahara marocain, basée sur la proposition marocaine d’autonomie, la MAP a mis en avant que l’AFP « joue le rôle de torpilleur d’efforts de paix à coup de papiers qui font l’éloge du séparatisme et glorifient des militants de pacotille à la solde d’Alger ».

Politique, chantage et menaces !

Premier partenaire économique du Royaume, la France a perdu cette place en faveur de l’Espagne depuis quelques années. Toutefois, les intérêts économiques de l’hexagone au Maroc sont très importants notamment dans le secteur de l’industrie automobile. Après la réussite phénoménale du projet de l’usine de Renault dans la ville de Tanger au nord, un nouveau projet a vu le jour dans la ville de Kénitra au centre du pays. Il est porté par Peugeot (PSA). Un modèle de réussite qui risque d’être compromis par cette nouvelle crise.

Le ministre français de l’Économie Bruno Le Maire n’a pas hésité à qualifier ce modèle d’échec. Devant l’ensemble des professionnels de la filière automobile, le responsable français a nourri les doutes autour de cette crise silencieuse entre la France et le Maroc dont une grande partie de l’économie à l’export est désormais basée sur l’industrie automobile.

« Qu’est-ce que cela veut dire ? Nous produisons et nous assemblons au Maroc, en Slovaquie en Turquie pour réimporter en France à des fins commerciales. Je ne me satisfais pas d’un modèle où les deux véhicules les plus vendus en France – la Clio et la 208 – ne sont plus produits en France. Ce modèle de développement est un échec », a lancé le ministre dans des propos qui ont du mal à passer à Rabat.