C’est une première en Tunisie et ça s’est passé le 17 et 18 novembre dernier. Les victimes des dictatures de Ben Ali et de Bourguiba ont parlé, ouvertement et directement devant les caméras de la télévision tunisienne. Au total, ils ont été onze personnes à livrer leurs témoignages et à raconter leurs souffrances subies dans les geôles de l’État.

Organisées par l’Instance vérité et dignité tunisienne, ces auditions publiques ont pour objectif de dévoiler les atrocités commises sous le règne des deux dictateurs. Torture, assassinats, viols, séquestrations… les victimes tunisiennes des « années de plomb » ont révélé certains aspects de la violence de l’ancien régime.

Six années après « la révolution du Jasmin » ayant entrainée la déchéance de l’ancien président, Zine El Abidine Benali, la Tunisie avance sereinement sur le chemin de la réconciliation nationale. Avec le lancement du processus de justice transitionnelle à la fin de l’année 2013 et la création de l’Instance Vérité et Dignité (IVD), les autorités compétentes ont traité les dossiers de plus de 62 000 victimes de l’ancien régime.

Dans les détails, sur les 62 000 dossiers déposés auprès de l’IVD, le quart ont été déposés par des femmes. Selon des militants des droits de l’homme tunisiens, beaucoup de tunisiennes n’avaient pas osé révéler les sévices subis dans les prisons de l’ancien régime. Jusqu’à aujourd’hui, quelque 11 000 victimes ont été auditionnées à huis clos par l’Instance, apprend-on auprès des militants. D’autres témoignages publics sont prévus prochainement. En effet, certains des bourreaux de l’époque vont devoir, à leur tour, livrer publiquement leur version des faits.

Pour rappel, la fuite de l’ancien dictateur tunisien en Arabie Saoudite en 2011 avait révélée au grand jour la face cachée d’un système à la réputation flatteuse à l’étranger. Militants de gauche et d’extrême gauche à l’époque du président Bourgiba, puis des syndicalistes et des islamistes sous la présidence de Ben Ali, figurent en tête des victimes de la redoutable machine de répression mise en place par l’ancien régime.