Le fiasco des législatives en Tunisie, marquées par une abstention de plus de 90%, est un camouflet pour le président Kais Saied, dont l’opposition a réclamé hier dimanche le départ.
Le chef de la principale coalition d’opposants, Ahmed Nejib Chebbi, a appelé le président à « quitter ses fonctions immédiatement », face à une participation de seulement 8,8% samedi au premier tour.
Il s’agit du taux le plus bas depuis la révolution de 2011 qui avait chassé du pouvoir le dictateur Zine El Abidine Ben Ali et fait émerger la première démocratie du monde arabe.
« C’est un grand désaveu populaire pour le processus » démarré le 25 juillet 2021, quand Kais Saied avait gelé le Parlement et limogé son Premier ministre, s’emparant de tous les pouvoirs, a déclaré Chebbi à l’AFP.
Les Tunisiens « ont tourné le dos à son processus illégal », a poursuivi M. Chebbi, le président du Front de Salut national (FSN), dont fait partie le mouvement d’inspiration islamiste Ennahdha, bête noire de M. Saied et ancien parti majoritaire au Parlement jusqu’à l’été 2021.
Il a appelé les autres formations politiques à « s’entendre sur la nomination d’un haut magistrat », capable de « superviser une nouvelle élection présidentielle ».
Ce fiasco électoral va compliquer, selon le FSN, les négociations entre la Tunisie et le Fonds monétaire international (FMI) pour un prêt de près de 2 milliards de dollars, dont le pays très endetté a un besoin urgent.
Ces législatives représentent le point final de l’édification d’un système hyper-présidentialiste par le président Saied, élu en 2019, avec l’élection d’un Parlement privé de l’essentiel de ses pouvoirs après une révision constitutionnelle cet été.
Jusqu’à présent critiques du processus lancé par M. Saied, les Etats-Unis ont qualifié dimanche la tenue de ce scrutin de « premier pas essentiel vers la restauration de la trajectoire démocratique du pays ».
Même si, selon le Département d’Etat américain, la forte abstention « renforce la nécessité d’élargir davantage la participation politique au cours des prochains mois ».
Le nouveau mode de scrutin interdisait toute affiliation politique pour des candidats le plus souvent inconnus, ce qui a contribué à faire chuter la participation, selon les experts.