Le général de corps d’armée Mahamat Idriss Déby a pris la présidence du Conseil Militaire de Transition (CMT) mardi et y a aussitôt nommé 14 autres généraux parmi les plus fidèles de son père, une junte de «transition » qui promet de réinstaller de nouvelles institutions à l’issue d’élections « libres et démocratiques » dans 18 mois.
Le jeune général Mahamat Idriss Déby apparaissait régulièrement aux côtés de son père Idriss Déby Itno dont il coordonnait la sécurité rapprochée au moindre déplacement.Au lendemain de la mort de celui qui dirigeait le Tchad d’une main de fer depuis 30 ans, ce général quatre étoiles à seulement 37 ans était à la tête de l’unité d’élite et garde prétorienne du régime, la redoutable Garde présidentielle.
Mahamat Idriss Déby apparaît de facto comme le nouvel homme fort du pays, créant la surprise car les experts expliquaient jusqu’alors que le vieux chef de l’Etat n’avait pas choisi de dauphin et se souciait peu de sa succession.
Commandant en chef de la toute puissante Direction Générale des Services de Sécurité des Institutions de l’Etat (DGSSIE), le nom officiel de la Garde présidentielle, des « bérets rouges » affutés et suréquipés, il est surnommé Mahamat « Kaka » – « grand-mère » en arabe tchadien, en référence à la mère du défunt président, qui l’a élevé, rapporte l’AFP.
« L’homme aux lunettes noires » comme l’appellent certains militaires, est présenté dans l’armée comme un officier discret et taciturne, attaché à ses soldats.
Pur produit de l’armée tchadienne
Militaire de carrière, comme son père, il appartient aussi à la même ethnie, les Zaghawas, dont les officiers sont particulièrement nombreux au sommet d’une armée considérée comme l’une des meilleures de la région.
« Il a toujours été aux côtés de son père. Il a aussi dirigé la DGSSIE. L’armée a choisi la continuité du système », explique Kelma Manatouma, chercheur tchadien en sciences politiques à l’université Paris-Nanterre, cité par l’AFP.
Mais ces derniers mois, l’unité des Zaghawas s’était à nouveau fissurée, et le Maréchal Déby avait dû récemment écarter certains officiers douteux, selon des proches du Palais.Fils d’une mère gorane, une autre ethnie saharienne, Mahamat est également marié à une Gorane, Dahabaye Oumar Souny, journaliste au service de la presse présidentielle et fille d’un haut gradé proche de l’ancien président Hissène Habré, renversé en 1990 par M. Déby.
Pour cette raison notamment, Mahamat est regardé avec méfiance par sa communauté zaghawa, selon plusieurs experts de la région. Il a grandi à N’Djamena avant d’être envoyé au lycée militaire d’Aix-en-Provence, dans le Sud de la France, où il n’est resté que quelques mois.
De retour au Tchad, il poursuit sa formation au Groupement des écoles militaires interarmées de la capitale et intègre, à sa sortie, la Garde présidentielle au sein de laquelle il gravit rapidement les échelons.
A la DGSSIE, il a été successivement commandant d’escadron de blindés et d’une unité de gardes du corps, commandant du groupement numéro un chargé de la sécurité du Palais présidentiel avant de prendre le commandement de toute l’institution.
Au combat, il s’illustre notamment en 2009 lors de la victoire finale d’Am-Dam contre les combattants de Timan Erdimi, neveu de M. Déby entré en rébellion dans l’Est du Tchad, et repoussés un an plus tôt devant les portes du Palais présidentiel de N’Djamena grâce à l’appui décisif de l’armée française.
Longtemps dans l’ombre de son frère, Abdelkerim Idriss Déby, directeur de cabinet adjoint du président, il était entré dans la lumière lorsqu’il a été nommé commandant-adjoint des forces armées tchadiennes en intervention au Mali en 2013. Il côtoie alors les militaires français de l’opération Serval, alliés de son père contre les terroristes dans la région.