L’indépendance n’est pas une fin en soi. Elle doit permettre aux peuples naguère spoliés et exploités de recouvrer leur souveraineté et de disposer de leurs ressources naturelles pour impulser un développement économique profitable au plus grand nombre.

Pour les Droits de l’Homme

Pendant des décennies, de nombreux militants des Droits de l’Homme et simplement de l’autodétermination des peuples ont soutenu la lutte des Sud-Soudanais contre la domination du pouvoir de Khartoum. La situation était d’autant plus révoltante qu’elle avait aussi un relent ethniciste voire raciste car les Arabo-musulmans confisquaient le pouvoir au détriment des Noirs du Sud majoritairement chrétiens et animistes.

Finalement c’est en 2011 qu’un accord négocié avec un appui important de la communauté internationale a abouti à l’indépendance du Sud-Soudan. Ce fut comme pour le cas de l’Erythrée une entorse exceptionnelle à la doctrine de l’OUA – l’Organisation de l’Unité africaine – devenue UA – Union africaine – qui préconise l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation.

La Paix et l’Union nationale après la guerre civile

Mais la seule couleur de la peau ne fait pas l’unité politique. La lutte pour le pouvoir transcende les barrières de couleur. Elle est universelle. C’est ainsi qu’après seulement deux ans les deux leaders du nouvel Etat, à savoir le président Salva Kiir et le vice-président Riek Machar, qui appartiennent à deux ethnies différentes – respectivement les Dinka et les Nuer – se sont tourné le dos.
Cette rupture a entraîné une guerre civile sanglante qui n’a pris fin qu’en 2015 avec un accord de paix signé le 26 août. Selon cet accord de paix, un gouvernement d’union nationale transitoire devrait être formé avec seize ministre pour les partisans de Kiir et dix ministres pour la mouvance de Machar.

Mais depuis lors les choses traînent, même si le 7 janvier dernier le président Salva Kiir a entériné la nomination de cinquante députés rebelles.

Retour du Vice-Président Machar

Le point d’achoppement est désormais le retour du vice-président Machar au pays pour que l’accord puisse se traduire effectivement et entièrement sur le terrain. La date butoir fixée par la communauté internationale au 24 avril vient d’être dépassée sans que Riek Machar ne puisse faire le voyage. L’ONU et les Etats Unis, le Royaume Uni et la Norvège ( Etats superviseurs – font pression sur le président Kiir pour qu’il respecte ses engagements.

Tout devrait en principe rentrer dans l’ordre et le vice-président pourra prochainement rejoindre la capitale Juba.

Pourtant, même si le nouveau gouvernement entre en fonctions la normalisation sera toujours fragile tant que la question du partage des revenus pétroliers ne sera pas définitivement réglée.
De ce point de vue, la décision du chef de l’Etat Salva Kiir de découper la région pétrolière en dix Etats laisse perplexe. Cela porte le nombre total d’Etats confédérés à vingt-huit, sans qu’il y ait de justification économique ou politique.

Lutte tendue pour le pouvoir et pour le contrôle des ressources

Tout laisse croire qu’il s’agit d’une manœuvre politicienne qui pourrait compliquer des relations déjà très tendue.

A l’évidence c’est bien la lutte pour le pouvoir et le contrôle des ressources qui explique le conflit au sommet de l’Etat, maquillée en bataille ethnique entre Dinka et Nuer. Même s’il est vrai que pendant des décennies ces deux ethnies et d’autres – le Sud-Soudan compte soixante langues nationales identifiées – ont eu des confrontations sporadiques.

Le problème ,comme dans beaucoup de pays africains, et d’autres en Asie par exemple, est que ces conflits sont utilisés par des politiciens douteux pour manipuler les populations.

Si la communauté internationale veut trouver une solution durable au Sud-Soudan, il faut qu’elle arrive à faire signer et appliquer un accord équitable sur le partage des ressources et leur utilisation pour développer l’ensemble des régions du pays.

Un défi : se construire, sur fond de responsabilité internationale

Le Sud-Soudan devrait avoir pour objectif majeur la lutte contre la pauvreté et pour la santé et l’éducation. Ce jeune Etat doit aussi relever le défi de construire des infrastructures modernes pour faciliter le transport des biens et des personnes, favoriser le tourisme en mettant en valeur ses trésors culturels et naturels.

Dans ce pays où tout est à faire,il est de la responsabilité de la communauté internationale de veiller à ce que l’accord de paix du 26 août 2015 soit mis en application.

Salva Kiir qui traîne des pieds doit entendre raison et laisser Riek Machar revenir à Juba.

La réconciliation est certes de circonstance, mais cela est mieux que rien.

 

 

Image : A gauche Salva Kiir, président du Sud-Soudan. A droite Riek Machar, Vice président sud-soudanais doit revenir à Juba sur la base de l’accord du 26 août 2015.