Le secrétaire général national du Parti démocratique sénégalais (PDS), principal parti d’opposition au Sénégal, court-il vers une implosion inéluctable ?
Après avoir perdu le pouvoir en 2012 devant le candidat de l’Alliance Pour la République (APR), l’actuel président de la République, M. Macky Sall, ancien N°2 du PDS, le premier parti libéral du Sénégal a aligné les revers depuis la cuisante défaite de mars 2012 : aux législatives de juillet 2012, le PDS n’a obtenu que 12 sièges à l’Assemblée nationale, contre 131 aux législatives précédentes (juin 2007).
Le parti de Me Abdoulaye Wade, a également perdu la plupart de ses cadres dont Pape Diop, ancien président du Sénat et N°2 tant au niveau de l’État que du parti, Souleymane Ndèné Ndiaye, dernier Premier ministre de Wade, l’ancien ministre d’État et dernier directeur de Cabinet de Me Wade, M. Habib Sy, etc.
En fin tacticien, Me Wade a toujours su tirer son épingle du jeu, face à la machine redoutable du Parti socialiste, mais faute d’une stratégie de conservation du pouvoir, il perd lamentablement le duel au bénéfice de son ancien Premier ministre, M. Macky Sall, qui a pu déjouer tous les pièges et subterfuges, tendus par son ancien mentor. Cela, parce que, Me Wade est plus un fin tacticien qu’un bon stratège.
En 2012, le slogan qui a eu raison du président sortant, Me Abdoulaye Wade, n’était rien d’autre que « Le Sénégal, une république et non une monarchie », en réaction aux velléités du président d’alors de se faire remplacer au pouvoir par son fils biologique, Karim Maïssa Wade. Le candidat Macky Sall qui l’a battu en 2012, avait été poussé à la démission de son poste de président de l’Assemblée nationale quatre ans auparavant, pour avoir voulu exercer le pouvoir de contrôle, conféré par la constitution à l’institution qu’il dirigeait, sur la gestion de Karim Wade, alors président du conseil de surveillance de la juteuse Anoci (Agence nationale pour l’organisation du sommet de l’Oci)!
Depuis 2012, tous les présidents du groupe parlementaire des libéraux, ont eu mailles à partir avec le maître du « Je », l’ambivalent Abdoulaye Wade. Mme Aïda Mbodji, dite la lionne de Bambey et Modou Diagne Fada ont fini par quitter le PDS après avoir dirigé le groupe parlementaire affilié au dit parti.
Le dernier sur la liste, Me Madické Niang vient de faire les frais de ses ambitions, pourtant légitimes. Avocat de Karim Wade, Me Niang a été l’une des rares personnes à avoir accompagné Karim lors de sa sortie de prison, suite à une grâce présidentielle…Mieux, c’est chez Me Madické Niang que l’ancien prisonnier de Reubeuss a pu faire un crochet, pour se débarrasser des habits qu’il portait en prison.
Madické l’aurait accompagné jusqu’à la porte du Jet Privé qui devait le transporter avec le procureur qatari, vers Doha, où il réside jusqu’à présent. Me Niang est sensé connaître les moindres détails du dossier de Karim Wade. Fort de cela, il soutient avoir adressé récemment, une lettre confidentielle, au secrétaire général national du parti, Me Abdoulaye Wade, pour suggérer la désignation d’un candidat alternatif, au cas où la candidature de Karim serait rejetée. Faut-il rappeler que ce dernier n’a même pas été inscrit sur les listes électorales, ce qui voudrait dire autrement qu’il n’est ni électeur, ni éligible.
Maniant avec aisance, la technique de la diversion et de la fuite en avant, Me Abdoulaye Wade feint d’ignorer l’existence de cette alerte de Me Madické Niang, jusqu’au moment où un groupe de militants du PDS, dont des députés libéraux de la ville religieuse de Touba, adressent une missive collective au Secrétaire général national du parti, lui demandant d’élaborer un plan « B » pour parer à toute forclusion, sachant que la candidature de Karim est plus qu’aléatoire.
Appréhendant le danger d’implosion de son parti, Me Wade utilise la tactique de « neutralisation anticipée ». Il publie, via la presse, une lettre au ton d’un pamphlet, adressée à Me Madické Niang. Pris de court par l’instantanéité et la violence de l’attaque, Me Madické réplique maladroitement et mollement, tel un lutteur qui reçoit un uppercut, avant que l’arbitre ne donne le coup d’envoi. Il invoque leur marabout commun, le vénéré guide Cheikh Ahmadou Bamba, et jure de « n’avoir jamais trahi Me Abdoulaye Wade » !
Sentant que sa proie est atteinte, mais n’ayant plus suffisamment de ressources pour l’achever, Me Wade, use de la reculade, une tactique de combat, dont lui seul, sait en user et en abuser. Il publie un autre communiqué, dans lequel, il se confond en excuses, invitant sa victime de comprendre « sa spontanéité et de passer l’éponge ». Il se réfère, lui aussi, au guide religieux commun, pour se donner une dose de sincérité.
En dépit des apparences, l’irréparable s’est déjà produit. La lettre discrète de Madické avait déjà révélé, ce que tout le monde savait : Karim Wade ne sera pas candidat en 2019 ! De son côté, Me Wade comprend désormais que Madické et sa bande, sont à bout de patience et risquent de quitter le navire des Wade en cas de naufrage.
En vilipendant Me Madické Niang de cette manière, Me Wade a voulu, d’une part, transmettre un message à Madické dont voici le contenu : « Je suis au courant de tes démarches souterraines et je te garde désormais à l’œil ». D’autre part, Me Wade a voulu, comme il l’a fait avec toutes ses victimes, « déconstruire l’image de ce téméraire qui ose avoir une ambition, autre que celle d’élire le prince Karim » qui, à force de côtoyer les princes du Golfe a fini par croire qu’il en est un…
Il reste cependant important d’observer que, malgré le nombre élevé de ses dauphins victimes, Wade n’a réussi à n’en sacrifier que ceux qui se sont prêtés à son jeu de cache-cache et de deals nocturnes.
De feu Fara Ndiaye, en passant par Serigne Diop « Sadakhta », Ousmane Ngom, Idrissa « Bakka » Seck, Macky Sall, à Me Madické Niang, seul Macky Sall a refusé de céder à la tactique des « excuses » empoisonnées du Maître. Après avoir reçu les coups prémédités, Macky Sall a décidé fermement de lui tourner le dos définitivement et de résister à ses assauts avec détermination et courage. Résultat : il le bat à plates coutures lors de la présidentielle de 2012 et, depuis cette date, le Maître Wade a toujours perdu ses combats contre son disciple Macky ! Pourtant, avant lui, Idrissa “Bakka” Seck aurait pu gagner la bataille présidentielle en 2007 devant le même Wade, s’il n’avait pas mordu à l’hameçon du pêcheur Machiavel.
Madické n’aurait pas tiré profit de l’expérience Macky, s’il est avéré qu’il s’est rendu à Doha, pour une séance d’explication avec les Wade, comme le laisse croire une rumeur persistante. Le faisant, Me Niang aurait répété l’erreur fatale de Ndamal « Bakka » (Idrissa Seck) en allant répondre en 2007, à l’appel-piège du maître.
En voulant sacrifier les fils spirituels pour introniser son fils biologique, Karim -qui n’a jamais rien prouvé sur la scène politique sénégalaise-, Me Wade a révélé au grand jour, qu’il est plus un homme rusé qui profite de la faiblesse de ses adversaires, qu’un bon stratège, capable de venir à bout des adversaires les plus redoutables. L’épisode Madické-Wade, quel qu’en sera l’issue, pourrait annoncer le début de la fin du feuilleton politique du Maestro Abdoulaye Wade, dans lequel, Karim Wade, n’aura joué qu’un piètre rôle par procuration.