
L’Organisation des Nations unies dénonce de graves exactions dans l’est de la République démocratique du Congo, où le groupe armé soutenu par le Rwanda aurait sommairement exécuté plusieurs enfants.
Les Nations unies ont accusé, mardi 18 février, le groupe rebelle du Mouvement du 23 mars (M23) d’avoir procédé à des exécutions sommaires d’enfants après avoir pris le contrôle de Bukavu, capitale provinciale du Sud-Kivu. Cette avancée marque une nouvelle étape dans la crise sécuritaire qui secoue l’est de la République démocratique du Congo (RDC), où Kigali et Kinshasa s’affrontent par groupes armés interposés.
Une situation « chaotique » et des témoignages accablants
« Nous avons confirmé des cas d’exécutions sommaires d’enfants par le M23 après son entrée dans Bukavu la semaine dernière », a déclaré Ravina Shamdasani, porte-parole du Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU, lors d’un point de presse à Genève. La responsable onusienne a toutefois insisté sur la difficulté d’obtenir des bilans précis en raison du chaos qui règne sur place.
« Nous n’avons pas encore de chiffre global, mais de nombreux rapports font état d’abus graves que nous devons encore vérifier », a-t-elle précisé. Selon les informations recueillies par les Nations unies, trois jeunes garçons auraient été tués après avoir été interceptés par des combattants du M23 alors qu’ils transportaient des armes trouvées au sol. « Les assaillants leur ont ordonné de les remettre. Face à leur refus, ils ont été exécutés », a détaillé Mme Shamdasani.
L’avancée du M23 et l’implication du Rwanda
Depuis plusieurs semaines, les forces du M23, appuyées par des troupes rwandaises, progressent rapidement dans l’est congolais. Après s’être emparés de Goma fin janvier, les combattants rebelles ont pris Bukavu dimanche 16 février, en dépit des efforts de l’armée congolaise et de ses alliés pour les stopper.
Le gouvernement congolais accuse le Rwanda de soutenir activement cette offensive, avec l’objectif de prendre le contrôle des riches ressources minières du Nord et du Sud-Kivu. Kigali rejette ces accusations et affirme que sa principale préoccupation demeure la présence des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), un groupe armé composé d’anciens génocidaires hutus ayant fui le pays après le génocide de 1994.
Des violences en cascade et un risque d’embrasement
Dans ce contexte de tensions croissantes, l’ONU alerte sur une aggravation rapide de la situation humanitaire et des violations des droits fondamentaux. « La situation se détériore fortement, entraînant des exécutions sommaires, des violences sexuelles et des attaques contre des infrastructures médicales et humanitaires », s’est alarmée Mme Shamdasani.
Volker Türk, Haut-Commissaire aux droits de l’homme, a quant à lui exprimé son « horreur » face aux exactions perpétrées au Nord et au Sud-Kivu. « La violence doit cesser immédiatement », a-t-il plaidé, appelant à une reprise du dialogue dans le cadre des processus diplomatiques de Luanda et de Nairobi.
L’ONU redoute un élargissement du conflit, dont les conséquences pourraient être désastreuses pour la région. « Le risque d’un embrasement plus profond est terriblement réel », a averti Mme Shamdasani.
Un afflux de réfugiés vers le Burundi
Alors que les combats s’intensifient, des milliers de civils fuient les violences. Selon le Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR), entre 10 000 et 15 000 personnes ont déjà traversé la frontière vers le Burundi ces derniers jours, la majorité d’entre elles étant originaires de Bukavu. D’autres déplacés internes cherchent refuge ailleurs en RDC, bien que les chiffres restent encore « relativement faibles », selon Matthew Saltmarsh, porte-parole du HCR.
Dans un climat régional déjà marqué par de fortes tensions, l’offensive du M23 et les exactions rapportées par l’ONU risquent d’aggraver encore davantage une crise qui, depuis plus de deux décennies, ensanglante l’est congolais.