Le président Mohamed Bazoum

Eviter de nouveaux massacres et enrayer le caractère ethnique du conflit: le Niger, qui menace de sombrer dans le chaos après une série d’attaques parmi les plus meurtrières au Sahel, fait face au défi immense de devoir intensifier plus encore son effort dans la lutte anti-terroriste.

« A 60 km, 100 km de la capitale, on peut tuer des dizaines et des dizaines de civils sans que nos forces ne puissent réagir », s’insurge un ancien militaire nigérien, cité par l’AFP. Les attaques contre des civils se sont multipliées depuis le début de l’année: plus de 300 personnes ont été tuées dans trois séries d’attaques contre des villages et des campements de l’ouest du pays, frontalier du Mali. Aucune n’a été revendiquée.

Mais l’organisation terroriste « Etat islamique » (EI) est montrée du doigt: ses membres sont implantés dans les zones attaquées, et les représailles sont un de leurs modes opératoires.

Dans la région de Tahoua, où 137 civils ont été tués dimanche dans des campements nomades, comme dans celle de Tillabéri – toutes deux proches du Mali -, il y a des « embryons de constitution de milices de résistance », explique Ibrahim Yahaya Ibrahim, chercheur à International Crisis Group (ICG), cité par l’AFP.

« Il faut voir ces attaques comme une forme de punition collective contre ces communautés où une résistance s’organise », estime-t-il. Dans ces régions rurales et pauvres, les populations subissent la pression des terroristes de l’EI par le prélèvement de l’impôt islamique – la zakat -, l’enrôlement et la radicalisation des moeurs.

 Doublement des effectifs militaires

Le Niger a annoncé fin 2020 vouloir doubler ses effectifs militaires en cinq ans, de 25.000 à 50.000 soldats. Niamey valorise le dialogue avec les communautés locales visées et refuse toute négociation avec les groupes terroristes. Objectif, rassurer sur une présence de l’Etat, souvent vu comme prédateur notamment à cause de nombreuses exactions, et faire sortir les jeunes du giron terroriste.

Suite à ces initiatives menées par la Haute autorité à la consolidation de la paix (HACP), son président, le général Amadou Abou Tarka, s’est targué mardi soir à la télévision publique d’avoir eu « quelques succès ».

Ces initiatives doivent s’articuler avec l’effort militaire, érigé attaque après attaque comme « priorité absolue » sans pour autant que la situation s’améliore. « Il y a des acquis en matière de sécurité et le gouvernement de Mohamed Bazoum va les consolider en corrigeant les lacunes constatées », veut rassurer un de ses proches, Abderahmane Ben Hamaye, cité par l’AFP.

Mais, estime-t-il aussi, « le problème du Niger vient d’ailleurs, il faut avant tout régler impérativement les épineuses questions malienne et libyenne d’abord ». Comme au Burkina Faso, beaucoup au Niger réfutent la présence sur le territoire national de terroristes et préfèrent détourner le regard vers le turbulent voisin malien.

Selon un observateur de l’ONU, « peut-être est-il temps que les politiques se rendent compte que les groupes terroristes recrutent désormais autant du côté nigérien de la frontière qu’au Mali ».