En présence d’une dizaine de chefs d’Etat, le sommet de la CEDEAO tenue, hier jeudi, à Accra, a décidé de sanctionner les putschistes guinéens. 

Ces derniers sont interdits de voyage, ainsi que les membres de leurs familles ; et leurs avoirs bancaires sont gelés.

Ils sont sommés d’organiser des élections présidentielles et législatives dans un délai de 6 mois.

Il leur est exigé aussi, la libération du président déchu, Alpha Condé.

Dans les faits, ces sanctions légitiment le coup d’Etat, car il n’est nulle part fait allusion à une restauration du régime de Condé, qui est donc « conjugué au passé ».

Les chefs d’Etat de la CEDEAO ont suivi les évènements qui se passent en Guinée : remplacement des gouverneurs et préfets de régions par des militaires, organisations de concertations nationales inclusives en cours, actes d’adhésion des populations et aucune manifestation en faveur de Condé. Même pas dans son fief supposé de Kankan.

Le coup d’Etat est devenu une réalité enracinée et approuvée par les citoyens guinéens.

La CEDEAO en prend acte et parle de l’organisation « dans un délai de 6 mois des élections ».

Ce deadline est impossible à respecter, avec toute la bonne volonté du monde, car il faudrait un audit du fichier électoral et la mise sur pied d’organes crédibles pour superviser les scrutins.

Les concertations en cours vont certainement permettre d’aborder cette question et de dégager un consensus.

La CEDEAO joue une fermeté de façade pour faire comprendre aux militaires qu’ils ne sont pas en roue libre.

Cela est compréhensible, mais l’évident est que la CEDEAO a peu de moyens de coercition, sur le plan économique, contre la Guinée.

En effet cette dernière n’est pas membre de l’UEMOA ( Union économique et monétaire ouest-africaine) et donc a sa propre monnaie nationale, différente du franc CFA.

Elle a sa propre banque centrale et, il serait étonnant que ses ressortissants aient beaucoup de comptes bancaires à l’étranger.

On peut se demander aussi, si les appels aux pays européens, à l’Union africaine (UA) et à l’ONU vont prospérer ?

Le commerce transfrontalier n’est pas interdit, encore moins les transports  terrestres et aériens.

Cela a été le cas avec le Mali, dans un premier temps.

Pour la Guinée, rien de tel et les sanctions sont plus de principe qu’autre chose.

Leur impact sera limité.

C’est une chance pour Mamady Doumbouya et ses camarades, qui doivent accélérer la cadence pour la formation d’un gouvernement d’Union nationale, qui ramènerait paix sociale et confiance des populations envers le nouveau régime.

Jusqu’ici les actes posés sont positivement appréciés ; mais le vrai défi sera la composition du gouvernement et le choix éventuel du Premier ministre.

Les équilibres ethniques, militaires, socio-professionnels, régionaux, etc. sont un casse-tête.

Tout choix comportera des exclusions qu’il faudra gérer avec subtilité.

Fixer la durée de la transition sera aussi une épreuve capitale à subir et à réussir.

Un juste milieu est à inventer, entre une transition trop longue et une trop courte.

Il s’agit d’une équation politique majeure à résoudre.

La communauté internationale devrait y aider, en se montrant flexible…

La CEDEAO est encore souple et ses décisions sont raisonnables, si on considère les enjeux politiques colossaux pour l’avenir d’un pays martyrisé par plus de 60 ans de dictature et de régimes autocratiques.

Le coup d’Etat de Doumbouya est une chance historique à ne pas rater.

La CEDEAO ouvre des portes où les putschistes et les amis authentiques de la Guinée, doivent s’engouffrer.

Et le moment de le faire, c’est maintenant !