Un an après sa chute, le 5 septembre 2021, l’ancien président guinéen Alpha Condé a brisé le silence. Le patriarche s’est confessé et reconnait avoir commis trois erreurs fatales qui ont conduit à sa déchéance. 

Réélu en octobre 2020 pour un troisième mandat très contesté, Alpha Condé croyait certainement avoir réussi son coup de force sans encombre. L’ex homme fort de Conakry avait alors pris des mesures radicales comme couper le contact avec certaines personnes qui avaient directement accès à lui. Pour ce faire, il avait changé ses numéros de téléphones portables, se privant, du coup, de précieuses sources d’information qui, l’auraient averti de ce qui se préparait contre lui, admet Alpha Condé, dans une confession faite à Jeune Afrique.

Pourtant, rapporte la même source, le chef d’antenne de la DGSE à l’ambassade de France à Conakry lui avait pourtant conseillé de rapatrier à la Présidence les services de la Direction générale du renseignement intérieur et de la placer sous son autorité directe. Condé lui avait opposé un niet catégorique. Il regrette amèrement de ne pas l’avoir écouté.

La plus grande erreur de Condé est sans doute sa trop grosse confiance à l’armée. En effet, après avoir réussi une réforme au forceps des services de sécurité, engagée depuis 2011, l’ex chef de l’Etat croyait alors tenir une armée républicaine épurée de « ses démons putschistes ». Il aimait d’ailleurs à répéter qu’il n’y aura plus jamais de coup d’État en Guinée. Il ne voyait pas venir le coup de force du 05 septembre dernier.

Condé n’a pas nommé Doumbouya !

Alpha Condé a confié à Jeune Afrique que ce n’est pas lui qui a nommé Mamady Doumbouya à la tête des fameuses Forces spéciales qui ont mené le coup d’Etat qui l’a renversé. Pourtant, l’actuel chef de la junte militaire, actuellement au pouvoir en Guinée, a soutenu avoir été reçu deux fois par le président déchu.

« Le CV de Doumbouya ne m’a jamais été soumis ; si j’avais su que c’était un ancien légionnaire français, je ne l’aurais jamais choisi », aurait confié Condé récemment à un visiteur, cité par JA.

La nomination du lieutenant-colonel Mamady Doumbouya à la tête des forces spéciales serait plutôt venue d’un groupe de pression composé de l’ancien Premier ministre Kassory Fofana, du ministre de la Défense d’alors, Mohamed Diané, de son Conseiller spécial Tibou Kamara et du général Namory Traoré.

Le même groupe qui avait été à l’origine de l’utilisation des Forces spéciales en 2019 pour réprimer la mutinerie de Kindia et le soulèvement de Ratoma, selon le magazine panafricain.

Alpha Condé est depuis plusieurs mois en Turquie, officiellement pour des soins médicaux, alors que la Guinée vit toujours sous le feu de la violence et de la contestation. Les acteurs politiques et la société civile s’opposent au nouveau gouvernement militaire qu’ils accusent d’autoritarisme et de manœuvrer pour rester le plus longtemps possible au pouvoir. 

En fin juillet et mi-août, des manifestations contre la junte militaire ont fait au moins 7 morts à Conakry.