C’est un Alpha Condé particulièrement véhément qui a pris la parole, hier mercredi 24 février 2021, à l’occasion du lancement du Forum de l’investissement en Guinée. Le Président guinéen a démenti, avec force, avoir emprisonné des opposants politiques dans son pays. Il a plutôt accusé la presse française de médisance à son encontre et de vouloir caricaturer son régime.
Très en verve devant de nombreux invités, Alpha Condé a affirmé, dans des propos largement relayés par la presse guinéenne, que «la Guinée a fait d’énormes progrès sur le plan des droits humains, mais on continue à la considérer comme avant. Des pays qu’on dit démocratiques en Afrique, ils mettent leurs opposants en prison. Nous, on n’a jamais mis d’opposants en prison. Les gens qui sont en prison ne sont pas des hommes politiques, malgré la campagne ».
Accusant nommément des organes de presse français de s’acharner contre lui et son régime, il poursuit : « Les journalistes français ne respectent pas les Chefs d’Etat africains. Moi je n’accepte pas qu’on ne me respecte pas. On doit se comporter avec moi comme avec le président français. Ce que tu ne peux pas faire au président français, tu ne le feras pas avec moi. C’est pourquoi RFI et France 24 racontent ce qu’ils veulent. Le mensonge peut aller vite, mais la vérité le rattrape toujours. La véritable image de la Guinée finira par être connue. Ce ne sont pas les ONG qui sont responsables ».
Alpha Condé a été réélu au premier tour pour un troisième mandat très contesté, à l’issue de l’élection présidentielle du 18 octobre dernier. Son principal opposant, Cellou Dalein Diallo s’était déclaré vainqueur du scrutin au lendemain du vote, affirmant détenir les preuves de sa victoire.
Son domicile avait été encerclé par l’armée, de même que le siège de son parti et ses bureaux assiégés. Plusieurs responsables de l’opposition avaient été ensuite arrêtés et emprisonnés après les violentes manifestations qui avaient éclaté dans le pays, faisant des dizaines de morts.
Quatre opposants morts en détention ces trois derniers mois
Quatre opposants guinéens sont déjà décédés en détention à la prison de la Maison centrale de Conakry ces trois derniers mois. Il s’agit d’Ibrahima Sow, de Mamadou Lamarana Diallo, du jeune Mamadou Oury Barry, âgé de 21 ans, originaire de la Commune de Ratoma, réputée être le fief de Cellou Dalein Daillo, et de Roger Bamba, membre de la cellule de communication de l’UFDG.
Le 8 février dernier, Mamady Condé, célèbre militant de l’UFDG, vivant au Canada, et connu sous le nom “Madic 100 frontières”, a été condamné à 5 ans d’emprisonnement ferme et au paiement d’une amende de cent millions de francs guinéens par le tribunal de Première instance de Dixinn pour injures et diffusion de messages et photos de nature raciste.
En fin janvier dernier, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, qui s’exprimait devant le Sénat à Paris annonçait des sanctions contre la Guinée, si la lumière n’était pas faite sur les «détentions hors procédure judiciaire d’opposants, en particulier l’opposant, monsieur Ousmane Diallo, (Franco-Guinéen), membre du parti du principal adversaire du Président Condé, Cellou Dalein Diallo) ».
Les responsables de partis d’opposition sont interdits de quitter la Guinée depuis les dernières élections. Plusieurs d’entre eux, dont Cellou Dalein Diallo et son épouse, ont été éconduits à l’aéroport de Conakry, alors qu’ils s’apprêtaient à voyager.