Les organisations de la société civile en Gambie, ont publié un livre blanc la semaine dernière pour mettre la pression sur Le gouvernement qui a jusqu’au 25 mai prochain pour se prononcer sur les recommandations formulées par la Commission vérité et réconciliation dans le rapport qu’elle a rendu fin novembre.
Dans ledit rapport publié après plus de deux ans de travail, la Commission avait demandé des poursuites contre les auteurs des crimes commis sous le régime de Yahya Jammeh. Mais depuis lors, le président Adama Barrow, réélu après l’élection du 4 décembre dernier, ne s’est pas prononcé sur ces conclusions formulées par la Commission.
« Dans ce livre blanc, nous avons regardé les conclusions de la Commission vérité, réconciliation et réparation, et nous ordonnons au gouvernement d’en examiner les recommandations. Nous voulons que les enjeux de responsabilités et de justice fassent en sorte que les personnes qui ont été désignées comme ayant commis des violations des droits de la personne et des crimes contre l’humanité soient tenues responsables et que justice soit rendue aux victimes », a déclaré sur RFI, Fatou Baldeh, la présidente d’une association féministe.
La société civile est d’autant plus suspicieuse que des connexions avaient été établies entre le parti de l’actuel président Adama Barrow et celui de l’ex chef de l’Etat, Yahya Jammeh, à la veille de la dernière élection présidentielle de décembre dernier.
Bai Lowe, jugé en Allemagne
Le 25 avril dernier, à Celle, en Allemagne, a été ouvert le procès du « jungler » Bai Lowe, un des assassins du journaliste gambien, Deyda Hydara. Les « jungler », constituaient un corps militaire créé au début des années 2000 et destiné à protéger le président Yahya Jammeh et à le servir. Bai Lowe âgé de 46 ans, avait été interpellé à Hanovre, en Allemagne, en mars 2021, il doit répondre devant le tribunal de Celle (Basse-Saxe), de crimes contre l’humanité, meurtres et tentatives de meurtre entre 2003 et 2006.
Le journaliste gambien Deyda Hydara, correspondant de l’AFP, avait été assassiné par balles, le 16 décembre 2004. Bai Lowe aurait convoyé en voiture les assassins du journaliste, selon l’acte d’accusation. L’accusé était à ces dates le chauffeur d’une unité des forces armées chargée d’assassiner des critiques du régime de Yahya Jammeh, le dictateur resté au pouvoir à Banjul pendant 22 ans.
Cette unité était utilisée, « entre autres, pour exécuter des ordres d’assassinat illégaux. L’objectif était d’intimider la population gambienne et de réprimer l’opposition», décrit le Parquet fédéral allemand.
Bai Lowe est également soupçonné d’avoir été complice de la tentative d’assassinat, en décembre 2003, d’un avocat réputé à Banjul, Ousman Sillah, un autre critique du président Jammeh. Il est aussi soupçonné d’être impliqué dans la mort, près de l’aéroport de Banjul, en 2006, de Dawda Nyassi, un opposant de l’ex-président gambien.
Outre Bai Lowe, deux autres acteurs présumés des exactions imputées à l’ex-régime gambien sont actuellement détenus à l’étranger. Ousman Sonko, ancien ministre de l’Intérieur, fait l’objet d’une enquête en Suisse depuis 2017 pour « crimes contre l’humanité » et un ex-« broussard », Michael Sang Correa, a lui été inculpé en 2020 aux États-Unis. Son procès pourrait débuter début 2023.
Le procès de Celle est prévu pour durer plusieurs mois.