Le premier ministre éthiopien et Prix Nobel de la paix, Abiy Ahmed, est aussi un chef de guerre. A l’expiration des 72 heures qu’il avait données aux rebelles de front de libération du peuple du Tigré( TPLF) pour se rendre, il a ordonné l’assaut final sur la capitale Mékéle. D’ores et déjà les communications avec la ville sont coupées.

Un drame humain, de grande ampleur, est en train de se dérouler dans une région où des dizaines de milliers de réfugiés sont comptabilisés et des centaines de milliers de personnes  pris en otage par le conflit et qui commencent à manquer de tout. L’assaut final ne va pas arranger les choses, au contraire.

Abiy Ahmed joue la force et cherche à réduire les chefs rebelles du TPLF, coûte que coûte. C’est son autorité politique et de chef de guerre qui est  sur la balance, même si son image d’homme de paix, consacrée par le jury Nobel, sera écornée à jamais. A-t-il le choix ?

L’Ethiopie a déjà perdu l’Erythrée depuis 1993, et n’a plus aucun accès direct à la Mer Rouge, le pays devenant enclavé et dépendant de ses voisins pour certains approvisionnements. Si le Tigré réussissait sa sécession, ce serait un coup fatal qui serait porté à la Fédération qui est très fragile du fait de ses lignes de fracture ethniques.

Ahmed veut donc tuer dans l’œuf la rébellion tigréenne le plus vite possible. Mais les Tigréens sont surarmés et disposent de forces estimées à 250 000 hommes. Ces gens-là ont dirigé le pouvoir central jusqu’à l’avènement de Ahmed, un homme issu de la majorité démographique Oromo. Le TPLF est certes en position de faiblesse par rapport à l’armée fédérale, mais il pourrait recourir à la guérilla, aux attaques suicide etc.

Un assaut réussi contre Mékélé ne sera pas la fin de l’histoire. Celle -ci ne peut être que politique, avec une négociation autour d’une table. Ahmed cherche, sans doute à se donner les moyens d’une négociation en position de force. Il faudrait donc faire attention à toute barbarie contre les civils qui va créer un sentiment d’hostilité durable.

Pour le moment la ville est encerclée et un véritable carnage risque de se produire d’autant que l’armée éthiopienne ne peut pas se permettre de s’engager dans un conflit interminable. L’Armée avait déjà demandé aux civils de quitter la ville avant l’assaut.

Beaucoup l’ont fait, mais un nombre encore plus important est resté sur place, pour de multiples raisons.  La communauté internationale intervient de manière timide. C’est regrettable.