Les affrontements se sont poursuivis mercredi dans l’est de la République démocratique du Congo, opposant les rebelles du M23 aux forces gouvernementales.
Comme ces derniers jours, marqués par une escalade du conflit, les principaux combats se sont concentrés autour de la ville de Sake, considérée comme un point stratégique crucial sur la route de la grande ville de Goma, capitale provinciale du Nord-Kivu.
Au cours des huit derniers jours, des milliers d’habitants de Sake ont fui vers Goma, rejoignant plusieurs centaines de milliers de personnes déplacées déjà entassées dans des camps insalubres à la périphérie de la ville.
Ce conflit entre les rebelles du M23, soutenus par des unités de l’armée rwandaise, et les forces armées de la RDC (FARDC), appuyées notamment par des groupes armés “patriotiques” (“wazalendo”), dure depuis plus de deux ans, exacerbant une crise humanitaire chronique dans la région, en proie à des violences armées récurrentes depuis trois décennies.
Comme l’a déclaré à l’AFP un militant des droits de l’homme, Vicar Batundi Hangi : “Goma est submergé par cet afflux massif de déplacés en provenance des territoires de Masisi, Rutshuru et Nyiragongo. Il est impératif d’accélérer les efforts diplomatiques pour mettre fin à cette guerre et permettre aux déplacés de rentrer chez eux”.
De son côté, Divin Ombeni Katabazi, président de la Société civile du Congo pour Goma, exprime son inquiétude : “Chaque jour, nous nous demandons si les rebelles vont avancer et dans quelle direction nous allons pouvoir nous diriger. La ville est dans l’impasse, elle étouffe. Il décrit une atmosphère de “psychose” parmi les habitants.
Le M23, majoritairement composé de Tutsis, a émergé en 2012 et avait brièvement occupé Goma vers la fin de cette année-là, avant d’être militairement vaincu l’année suivante. Il est réapparu en novembre 2021, reprochant au gouvernement de ne pas avoir respecté des accords sur la réintégration de ses combattants, et depuis lors, il a pris le contrôle de vastes étendues de territoire dans le Nord-Kivu.
Goma, une agglomération abritant plus d’un million d’habitants, est nichée entre le lac Kivu au sud et la frontière rwandaise à l’est. Actuellement, elle est pratiquement isolée de toutes ses voies d’accès terrestres vers l’intérieur du Congo, que ce soit au nord ou à l’ouest.
Sake, située au croisement de plusieurs routes, constitue un passage incontournable pour se rendre à l’ouest du Nord-Kivu ainsi que dans la province voisine du Sud-Kivu.
Selon Reagan Miviri, chercheur à l’Institut congolais Ebuteli, l’objectif du M23 pourrait ne pas être cette fois-ci de prendre Goma, mais plutôt de s’en rapprocher afin d’asphyxier la ville. Cela aurait pour but de contraindre le gouvernement à entamer des négociations, une option que Kinshasa a jusqu’à présent rejetée, refusant de dialoguer avec des “terroristes”.
Le président congolais, Félix Tshisekedi, a été réélu largement pour un second mandat le 20 décembre dernier. Durant la campagne électorale, il a adopté un discours belliqueux, menaçant de déclarer la guerre à Kigali et comparant le président rwandais Paul Kagame à Adolf Hitler en raison de ses “visées expansionnistes”.
Les autorités de Kinshasa misent sur le renforcement des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) pour venir à bout de la rébellion, refusant de négocier sur des points qu’elles estiment “non négociables”, comme le souligne le chercheur.
Dans le passé, des négociations ont conduit à l’intégration de rebelles dans l’armée congolaise, une pratique de “brassage” qui a affaibli cette dernière. Kinshasa refuse désormais d’envisager cette option.