L’ex-président burkinabe Blaise Compaoré deviendrait-il un hôte encombrant pour Ouattara ? Tout le laisse croire car la température de la chaleur des relations personnelles entre les deux hommes a beaucoup baissé. Il y a même un vent glacial qui souffle entre les deux.
Ce rebondissement surprenant s’explique par quelques libertés que s’est permis Blaise Compaoré. En effet il a rencontré à plusieurs reprises Guillaume Soro sans en avoir informé au préalable le chef de l’Etat ivoirien Alassane Ouattara son bienfaiteur et protecteur. Celui-ci l’a très mal pris.
Surtout que l’ambiance est de plus en plus délétère en Côte d’Ivoire où les ex-rebelles pro-Soro ont mis le feu aux poudres au propre comme au figuré pour provoquer des revendications en série pour des paiements de primes et des augmentations salariales. De nombreuses villes du pays se sont réveillées sous le feu nourri de protestataires(encore hier et ce jour) tirant en l’air. Même les pompiers ont fait le coup de feu au lieu de chercher à éteindre l’incendie.
Comme par hasard ces évènements bruyants et troublants -qui continuent- ont commencé lorsqu’il a été question de réélire le président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro qui faisait face à un seul et unique adversaire. Mais l’ex-mentor des « Forces Nouvelles » avait des inquiétudes ce qui explique sans doute pourquoi il est allé voir Pascal Affi Nguessan du FPI(parti du président déchu Laurent Gbagbo qui n’a que trois députés) pour demander son soutien alors que sa formation le RHDP en compte 167(majorité absolue).
En haut lieu on soupçonne l’ambitieux Soro de n’être pas tout à fait étranger au déclenchement de la « surchauffe ambiante ». Pour maintenir son poste et se positionner par rapport à 2020, date annoncée du départ à la retraite de Ouattara et Bédié.
Soro de son côté pense que Ouattara cherche à favoriser Amadou Gon Coulibaly son nouveau premier ministre et ancien directeur de cabinet pour lui succéder car le vice-président Daniel Kablan Duncan, successeur constitutionnel est un septuagénaire comme Ouattara et serait donc logiquement écarté de la compétition même si rien ne lui interdit de se présenter.
Il y a par ailleurs un autre concurrent redoutable pour Soro, le ministre de l’intérieur Ahmed Bakayoko qui lui ne cache pas ses ambitions.
C’est dans ce contexte de bataille politique souterraine mais féroce que « l’affaire Compaoré » survient. L’ex-président a toujours été très proche de Soro au point où ce dernier avait été accusé de complicité par l’ex-premier ministre burkinabé de transition Zida dans une tentative de coup d’Etat pour restaurer le régime Compaoré.
Le président déchu Compaoré est un habitué des coups tordus politiques et ne peut donc forcer sa nature trop longtemps en restant calme en Côte d’Ivoire, un pays limitrophe du Burkina où vivent plus de trois millions de ses concitoyens. Et puis il rêve toujours de revenir au pouvoir ou de peser sur un pouvoir(ivoirien en l’occurrence) pour nourrir ses désirs narcissiques. La drogue du pouvoir lui manque.
On comprend donc pourquoi Ouattara est excédé et fait la tête à son hôte à qui il avait donné la nationalité ivoirienne pour le soustraire à toute demande d’extradition. Va-t-il regretter son geste ?
Compaoré en tout cas ne se sentant plus en odeur de sainteté en Côte d’Ivoire s’active pour déménager à Lomé. Est-ce le bon choix ? Le régime de Faure Eyadéma est certes stable mais le Togo est un petit pays aux moyens limités. Compaoré, militaire de carrière a un problème de stratégie sécuritaire personnelle à résoudre.
Et c’est son propre sort qui est en jeu.