Le nouveau président burkinabé joue-t-il avec le feu ? Il est difficile de croire que le mandat d’arrêt contre Guillaume Soro, président de l’Assemblée Nationale de Côte d’Ivoire, ait pu être lancé sans son aval.
Tension inutile entre deux voisins
Si tel n’était pas le cas ce serait un fait gravissime. Son autorité serait alors mise en cause.
L’indépendance de la justice n’exclut pas la prise en compte des enjeux politiques et diplomatiques.
La demande n’a aucune chance d’aboutir dans ce cas d’espèce, et elle crée une tension inutile. Pire encore, le Burkina pourrait perdre gros dans un éventuel bras de fer.
Bataille perdue d’avance ?
Faut-il préciser qu’environ quatre millions de Burkinabés vivent en Côte d’Ivoire, et envoient beaucoup d’argent chez eux. Ouagadougou ne peut se permettre de se passer de cette manne financière.
Le Burkina dépend ainsi économiquement de la Côte d’Ivoire.
L’inverse est aussi vrai, mais la balance penche côté ivoirien.
La Côte d’Ivoire représente environ 40 % de l’économie globale de l’UEMOA. Ouagadougou – qui en abrite le siège – ne l’ignore pas.
Pourquoi donc engager une telle épreuve de force ? Pour mettre aussi sur la table la situation de Blaise Compaoré. Ce dernier est réfugié à Abidjan et fait lui aussi l’objet d’un mandat d’arrêt jusqu’ici ignoré par les autorités ivoiriennes.
Le début de mandat de Kaboré est tonitruant et risqué. Est-il en train de céder aux faucons de son parti, parmi lesquels Salif Diallo ? Suit-il la ligne Zida – le premier ministre de la transition – qui fut le premier à faire fuiter les enregistrements téléphoniques entre Diendéré et Soro ? Ces enregistrements sont-ils authentiques ?
Soro fragile
Il serait surprenant que Guillaume Soro, un homme politique certes jeune mais très intelligent, puisse tomber dans un tel piège. Il sait que le ministre de l’Intérieur ivoirien Hamed Bakayoko n’est pas particulièrement disposé à son égard, et il a d’autres ennemis qui cherchent la moindre faille pour lui nuire.
Dans l’état actuel des choses, il dépend plus que jamais du pacte politique et de confiance noués avec le président ivoirien Ouattara.
La relation Ouaga-Abidjan en jeu
Quant à Kaboré, il joue politiquement gros. Si rien ne se passe, ses relations avec son grand voisin ivoirien ne vont pas être des meilleures. Ce n’est pas dans l’intérêt du président du Burkina.
La présence de Blaise Compaoré de l’autre côté de la frontière crée toutefois de la nervosité à Ouagadougou et irrite au plus haut point, à juste titre, les autorités burkinabées.