La situation post-électorale au Congo est confuse : Félix Tshisekedi est déclaré vainqueur avec un peu plus de 7 millions de voix, suivi de Martin Fayulu 6 millions de voix et Ramazani Shadary 4 millions.
Dans la foulée les résultats des législatives annoncés donnent une majorité absolue avec environ 350 députés au parti du président sortant Joseph Kabila, le front commun pour le Congo (FCC).
Le parti du « président élu » Félix Tshisekedi, union pour le progrès et la démocratie sociale (UPDS) obtient seulement 49 sièges. Si ces résultats sont confirmés, dans moins de 10 jours maintenant, après l’examen des recours, la R.D Congo va basculer dans une « cohabitation », expérience inédite dans ce pays.
De facto, le parti de Kabila devrait s’adjuger le poste de premier ministre et la majorité des départements ministériels. Mais c’est le président de la République qui a le pouvoir de nomination. Le « deal » que beaucoup ont soupçonné sera alors, une obligation politique dans un contexte de cohabitation assumée. Le président sortant Joseph Kabila a déjà déclaré que le « nouveau président aura tous les pouvoirs ». Rien n’est moins sûr !
Sans majorité parlementaire, ni gouvernementale, comment imposer son autorité ? Et ce d’autant que les assemblées provinciales et le sénat (dont les membres sont élus par les députés provinciaux) sont sous la coupe du FCC ?
Tshisekedi Junior sera un président très affaibli, détenant cependant, de par la constitution, des pouvoirs régaliens importants. S’il ne coopère pas l’État sera paralysé, mais il en serait de même si les parlementaires majoritaires refusent de négocier avec lui.
Ce casse-tête chinois inquiète les citoyens et tous les amis du Congo car le pire pourrait se produire, à savoir le retour, ou plutôt l’intensification de la violence dans un pays toujours en proie à des conflits irréductibles claniques et/ou régionaux.
Cette situation déjà inextricable se complexifie encore davantage avec les contestations véhémentes du candidat Martin Fayulu, arrivé deuxième de la présidentielle, selon les résultats officiels et qui revendique la victoire.
La position de la conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) qui affirme connaître le nom du « vrai » vainqueur des élections présidentielles ajoute à la confusion. Et pourrait même verser de l’huile sur le feu.
Fayulu a déposé des recours qui vont être examinés dans les 10 jours qui suivent.
Que faut-il en espérer ? Pas grand chose car si la CENI (commission électorale nationale indépendante) se dédit pour déclarer Fayulu gagnant, une explosion sociale sera inévitable. Elle a commencé et des morts sont déjà comptabilisés.
Le casse-tête congolais est une cocotte minute qui risque d’imploser et de réduire à néant tous les efforts réalisés pour pousser Kabila sur le départ.
En vérité, toute cette confusion a été organisée par le pouvoir en place pour garder autant de positions politiques que possible pour protéger ses arrières comme on dit. Quitter le pouvoir totalement et laisser le jeu démocratique s’exercer librement est un luxe que Kabila ne peut pas se permettre.
Il a joué habilement le chaos et, il est difficile de l’accabler dans la mesure où il cède son fauteuil. Mais son frère et sa sœur ont été élus députés. L’immunité parlementaire est bonne à prendre, surtout lorsque l’exil n’est pas une option.
L’Union africaine doit entrer en scène pour calmer le jeu et favoriser un dialogue politique national qui pourrait déboucher sur un partage du pouvoir à imaginer. Ce sera ça ou le chaos. Et les principales victimes seront les populations innocentes. Elles méritent d’être protégées.