Les forces anti-émeutes soudanaises ont empêché lundi, à coup de gaz lacrymogènes, des manifestants de se diriger vers le palais présidentiel à Khartoum. Les manifestations contre la hausse du prix du pain enchaînent leur douzième jour de protestations antigouvernementales à travers le Soudan.
Lundi soir, le président Omar El-Béchir a appelé « tous les partis politiques à faire des propositions pour résoudre les problèmes économiques du pays ».
Plus tôt dans la journée et en réponse à l’appel d’une organisation de la société civile à marcher jusqu’au palais présidentiel, une foule d’hommes et de femmes scandant « Liberté, Paix et Justice » et « la révolution est le choix du peuple », s’était rassemblée dans le centre-ville de la capitale soudanaise. Mais les policiers sont aussitôt intervenus faisant usage de gaz lacrymogène pour disperser les manifestants, ont indiqué des témoins à l’AFP.
Des centaines de policiers, membres des forces de sécurité et des soldats ont été déployés dès le matin sur des places de Khartoum pour empêcher la manifestation. Certains policiers étaient à bord de pick-up avec des mitrailleuses, selon les témoins, qui ont vu des manifestants se mettre à l’abri dans des ruelles pour se protéger des gaz lacrymogènes.
Les forces de l’ordre ont empêché des groupes de protestataires rassemblés dans d’autres quartiers de converger vers le centre-ville pour rejoindre la marche prévue vers le palais du président Omar El-Béchir.
19 morts, 37 selon Amnesty
Le mouvement de contestation a été déclenché par la hausse du prix du pain, passé mi-décembre d’une livre soudanaise (1 centime d’euro) à trois alors que le Soudan connaît un marasme économique aggravant les conditions de vie de la population. Les protestations se sont ensuite transformées en manifestations antigouvernementales.
Au moins 19 personnes, dont deux membres des forces de sécurité, ont été tuées depuis le début du mouvement le 19 décembre, affirment les autorités selon qui la plupart des manifestants ont été victimes d’« incidents liés au pillage ». Amnesty International évoque un bilan de 37 morts.
Dimanche, le président soudanais a appelé la police à s’abstenir de recourir à une force excessive contre les manifestants, alors que les Nations unies ont demandé aux autorités soudanaises « de mener une enquête approfondie sur les morts et la violence ».
Amputé des trois quarts de ses réserves de pétrole depuis l’indépendance du Soudan du Sud en 2011, le pays a vu l’inflation s’établir à près de 70% annuellement, tandis que la livre soudanaise plongeait face au dollar américain. Des pénuries de pain et de carburants touchent plusieurs villes.